La grande messe de l’art contemporain

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 1 septembre 2005 - 501 mots

Elle a beau compter parmi les centenaires de la planète, la Biennale de Venise est une vieille dame pleine d’allant. Avec la Documenta de Kassel, qui a lieu tous les cinq ans, elle est l’une des deux grandes messes de l’art contemporain. Un rendez-vous que l’on prépare plusieurs mois à l’avance de peur de ne plus disposer ni de billet pour le voyage, ni de chambre où loger. Un rendez-vous que l’on prépare – Venise oblige ! – un peu comme une grande fête. Il faut dire que tous les deux ans, c’est le même rituel : la Biennale ouvre ses portes aux professionnels trois jours avant l’inauguration et c’est la ruée générale.
Tout ce que compte l’art contemporain est là : artistes, directeurs d’institutions, conservateurs, marchands, critiques d’art, collectionneurs, etc. Le coup de gong donné, tous se précipitent alors entre les différents points de la cité des Doges où il se passe quelque chose : ils envahissent les Giardini (les jardins) où se trouvent la plupart des pavillons nationaux et la grande exposition internationale ; ils parcourent tout l’Arsenal qui présente une sélection d’artistes internationaux autour d’un même thème ; enfin, ici et là, dans Venise même, ils vont et viennent d’un palais ou d’une église à l’autre, exceptionnellement occupés par les pays ne disposant pas d’un pavillon dans les jardins. Ce sont des centaines et des centaines de migrants qui s’entassent dans le vaporetto, errent au travers des calle, grimpent quatre à quatre les ponti, se perdent dans le labyrinthe enchanteur de Venise. Il faut les voir à l’affût de la moindre exposition, plans en main, chercher en vain telle adresse, s’échanger les infos.

Un vrai marathon
Le soir venu, changement de rythme et de décor : ils se posent et se retrouvent pour souffler et boire un verre place San Marco ou sur les quais avant de crapahuter à nouveau pour aller d’une fête à l’autre. Trois jours durant, c’est un vrai marathon, une course passionnée à l’art contemporain. C’est à peine s’ils ont le temps d’aller se ressourcer auprès de Bellini, Carpaccio, Tintoret ou Véronèse. La Biennale de Venise est un monstre. On se souvient, il y a deux ans, de l’excès de foule aux journées professionnelles, de la terrible canicule et de la surenchère d’expositions du cinquantième numéro. Pour parer cette année à tout encombrement, les organisateurs ont eu l’excellente idée de restreindre les accréditations, de réduire le nombre d’artistes exposés et de moins éparpiller les manifestations. Dirigée pour la première fois de son histoire par un duo – Maria de Corral et Rosa Martinez, toutes deux historiennes et critiques d’art –, la 51e Biennale de Venise présente ainsi un ensemble de prestations moins dense, donc plus serein à appréhender. Deux expositions majeures – « The Experience of Art » au pavillon international et « Always a Little Further » à l’Arsenal, respectivement organisées par l’une et l’autre – structurent les manifestations, quand bien même rien n’est moins sûr que cela transparaisse clairement à l’analyse...

« 51e Biennale de Venise », Venise, Giardini, Arsenal et divers lieux dans la ville, 12 juin-6 novembre, www.labiennale.org

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°572 du 1 septembre 2005, avec le titre suivant : La grande messe de l’art contemporain

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