Londres

La Gloire de Venise

Un autre âge d’or de Venise, le XVIIIe siècle, l’ère de Canaletto et de Tiepolo

Le Journal des Arts

Le 1 septembre 1994 - 686 mots

À partir du 15 septembre, \"La gloire de Venise\" à la Royal Academy, nouvelle initiative anglo-italienne ambitieuse, promet une exposition d’une importance comparable à l’exposition de 1983 \"Le génie de Venise\".

LONDRES - Alors que l’exposition de 1983 traçait un panorama de Venise au XVIe siècle, époque à laquelle la cité exerçait une puissance considérable, bien que déjà entamée, "La gloire de Venise" couvre tout le XVIIIe siècle jusqu’à la fin de la République. Elle se termine fort justement avec l’art de Canova, le seul grand artiste vénitien à avoir débordé sur le XIXe siècle et l’époque de la domination autrichienne.

L’exposition a choisi pour fil conducteur l’esprit d’innovation artistique, mais aussi la nostalgie des chefs-d’œuvre du passé. Le déclin du mécénat de l’État et le conformisme des commandes de l’Église furent pourtant à l’origine d’une explosion de vitalité artistique due à des protecteurs des arts – notamment des princes et des monarques étrangers – qui encourageaient l’exploration d’autres genres : vedute, portraits à l’huile et au pastel, tableaux de genre, capricci.

La seule production artistique
L’importance du mécénat étranger incita les maîtres les plus renommés à voyager : Ricci et Canaletto allèrent en Grande-Bretagne, Bellotto en Pologne, les Tiepolo en Espagne, Rosalba Carriera à Paris (elle fut la première femme admise à l’Académie des beaux-arts). À partir des années 1720, Venise s’imposa comme un des premiers centres artistiques, et ses peintres furent traités en conséquence.

"La gloire de Venise" présente leur travail. Si des expositions récentes, comme celle de la Villa Hügel, à Essen, disséquaient la vie et la culture d’une cité – Saint-Pétersbourg, Londres, Paris –, la Royal Academy s’en tient résolument à la production artistique vénitienne.

"Nous aurions pu nous pencher sur le théâtre, la musique ou les maisons de jeu en utilisant les peintures de Longhi, observe Jane Martineau, l’un des organisateurs de l’exposition, mais on aurait eu une exposition complètement différente." Elle montrera des livres superbement reliés, ainsi que des gravures (comme les merveilleuses vedute de Canaletto et de Marieschi, les fantaisies de Tiepolo et les prisons de Piranèse), des sculptures et quelques objets, dont la célèbre table sculptée de Brustolon provenant de la Ca’Rezzonico.

Simplicité
La présentation a opté pour la simplicité : chronologique, une salle sur trois étant consacrée aux gravures et aux dessins. Elle commence avec l’œuvre de Sebastiano Ricci, dont la redécouverte de l’art vénitien du XVIe siècle s’attachait surtout au travail de Véronèse. Ricci transmit à Tiepolo les grandes scènes de foules de Véronèse, son goût pour les costumes et les couleurs éclatantes.

Les organisateurs ont voulu emprunter des œuvres moins connues, même dans le cas des maîtres les plus reconnus. Le Danemark a prêté pour la première fois l’Arrivée de Frédéric IV de Danemark à Venise, par Luca Carlevaris. Nombre des œuvres présentées ont quitté Venise aussitôt peintes, pour rejoindre les collections des mécènes étrangers. La remarquable Vue de la Tamise par Canaletto entra dans la collection Lobkowicz à Prague au XVIIIe siècle, et n’est pas sortie de cette ville depuis (l’État l’a restituée depuis peu à ses anciens détenteurs).

La salle principale, consacrée à l’œuvre de G. B. Tiepolo, constitue la pièce maîtresse de l’exposition. De grands tableaux surmontent de majestueux autels, comme le monumental Saint Jacques convertissant les Maures, prêté par Budapest et peint pour la chapelle de l’ambassadeur d’Espagne à Londres. Jane Martineau n’a pas seulement mis en évidence la grandeur de ces œuvres : elle a montré aussi l’humour de nombre d’entre elles ; la Danaé de Tiepolo regarde la pluie d’or d’un air coquin, ses hanches rebondies formant le véritable centre d’intérêt de la composition. La mythologie se prêtait autant à la parodie qu’à la célébration.

Les autres salles de l’exposition s’attachent à l’œuvre de Piazetta, de Canaletto, des Guardi père et fils, de Zuccarelli, des deux Longui, de Belloto, Piranèse et Canova, ainsi que la production d’artistes moins connus du grand public.

\"La gloire de Venise\"

Londres, Royal Academy, du 15 septembre au 14 décembre 1994, puis de janvier à avril 1995 à la National Gallery à Washington. L’exposition s’accompagne d’un ouvrage établi par Andrew Robison et édité par Yale University Press.

Voltaire et l’Europe

Plus de 280 œuvres - peintures, dessins, gravures, manuscrits, livres imprimés, sculptures, objets d’art, médailles et mobilier - vont célébrer le tricentenaire de la naissance de Voltaire. Organisée par les Monnaies et Médailles et la Bibliothèque nationale, cette exposition "Voltaire et l’Europe", permettra également de découvrir une partie importante de la bibliothèque du philosophe des Lumières prêtée par la Bibliothèque nationale de Russie à Saint-Pétersbourg.

Elle illustrera en six étapes le parcours européen du pamphlétaire, la France, l’Angleterre, les Provinces Unies et les Pays-Bas autrichiens, l’Allemagne, Genève et Ferney, la Russie enfin. Cette manifestation complètera les diverses expositions organisées à Genève, notamment au Musée d’art et d’histoire et à la Maison Tavel.

Monnaie de Paris, 11, quai de Conti 75006 Paris, 29 septembre - 8 janvier.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°6 du 1 septembre 1994, avec le titre suivant : La Gloire de Venise

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