Coordonné par l’Association française d’action artistique/ministère des Affaires étrangères , « Côte Ouest » propose un ensemble impressionnant d’expositions organisées dans la partie occidentale des États-Unis, de Seattle à San Diego. Artistes français, jeunes et moins jeunes, ont été invités à montrer leurs œuvres ou à réaliser des projets spécifiques dans des musées, centres d’art, universités et écoles d’art. Un tour d’horizon de quelques expositions, du sud au nord de la Californie, permet de prendre la mesure d’une manifestation éclectique, mais qui reflète fidèlement les différents centres d’intérêt des directeurs des structures impliquées.
SAN FRANCISCO - Au centre de San Diego, en face de l’ancienne gare de Santa Fe, se dresse l’annexe “Dowtown” du Musée d’art contemporain de la ville, dont l’architecture contemporaine se situe loin du geste de Venturi pour le siège de l’institution, face à la mer, dans le quartier très chic de La Jolla. Les salles d’exposition, volontairement neutres, accueillent la série des “Walt Disney Productions” de Bertrand Lavier, un retour à l’envoyeur en quelque sorte : il s’est en effet inspiré d’œuvres imaginaires présentées dans un musée visité par Mickey et Minnie Mouse dans une bande dessinée de Walt Disney de 1947. Des pièces en deux et en trois dimensions ont ensuite été réalisées à partir de ces “peintures” et “sculptures”, comme celles colorées et modélisées grâce à des images de synthèse. Dans le même temps, le musée accueille, au rez-de-chaussée, une exposition de Georges Rousse, organisée par le Museum of Photographic Arts actuellement en rénovation. Son directeur en a d’ailleurs profité pour proposer au Français de travailler directement sur ses anciens locaux. Outre des pièces antérieures, l’artiste expose ainsi une nouvelle série de photographies, notamment celles réalisées en découpant la cloison de l’ancien bureau du directeur.
Le Petit Larousse 1965
Anne et Patrick Poirier proposent un autre type de travail archéologique au Getty Research Institute for the History of Art and the Humanities, à Los Angeles. Travaillant à partir d’archives conservées dans l’Institut qui se dresse fièrement sur l’éperon rocheux de Brentwood, nos deux artistes ont bâti en deux salles une scénographie imaginée à partir du roman de Wilhelm Jensen, Gradiva, où un archéologue est hanté par une figure féminine, une statue incarnée. Poussant jusqu’à la psychanalyse, les Poirier ont installé un divan face à quelques ouvrages sous vitrines, notamment signés Freud. Une autre forme d’écrit est développée dans la même ville par Tania Mouraud : elle a réalisé deux grands “wall-drawings” dans l’entrée du Armand Hammer Museum, le musée de l’Université de Californie à Los Angeles. Deux phrases sont inscrites à l’aide de lettres si déformées qu’il est à peine possible de les déchiffrer. La pièce, spécialement conçue pour le lieu, s’y intègre parfaitement : elle constitue une belle réussite pour cette artiste peu exposée aux États-Unis et à qui revenait la difficile tâche d’étrenner la présentation d’œuvres dans le vestibule du musée.
Autre approche de la lettre, du mot, celle que mène patiemment depuis quelques années Gilles Barbier, qui recopie le plus scrupuleusement possible les pages du Petit Larousse, édition de 1965. Au Musée des beaux-arts de Santa Barbara, il présente un ensemble de ces pages, mais aussi des rectificatifs et autres miniatures. L’exposition, qui comprend également quelques projets de dispositifs d’exposition des œuvres, est accompagné d’un cédérom permettant de visionner dans le détail l’ensemble du travail de copiste réalisé à ce jour.
Printparty sur l’Internet
Ce n’est pas à ce type de travail mais à quelques confrontations audacieuses que nous convie Alain Kirili à San Francisco. Le California Palace of the Legion of Honor, dont l’architecture est inspirée, comme son nom l’indique, de celle du palais éponyme sis en face du Musée d’Orsay, à Paris, réunit l’une des plus importantes collections au monde de sculptures de Rodin. Là, face au maître, Kirili présente une dizaine de ses créations en tout genre (acier, aluminium, terra cotta, bronze...) dans un “dialogue” qui confine parfois au monologue. À la fin du parcours , Kirili a placé quelques-unes de ses œuvres face à une peinture de Monet, un hommage au peintre de la touche.
Le Berkeley Art Museum & Pacific Film Archive ne propose pas d’hommage, même s’il consacre lui aussi une exposition à Rodin. Dans le cadre de “Côte Ouest”, le musée a préféré produire un projet de Valery Grancher, qui a demandé à vingt-quatre étudiants de l’Université de Californie à Berkeley de se photographier toutes les heures pendant une journée. L’ensemble de ces clichés est consultable sur l’Internet, à l’adresse www.bampfa.berkeley.edu. Le réseau permet encore de commander son propre catalogue de “Côte Ouest”, en tapant www.printparty.com, depuis les institutions participant au projet, mais aussi, naturellement, depuis chez soi...
BERTRAND LAVIER, jusqu’au 30 janvier, Museum of Contemporary Art, San Diego ; GEORGES ROUSSE, jusqu’au 30 janvier, Museum of Photographic Arts at MCA Downtown, San Diego ; ANNE ET PATRICK POIRIER, jusqu’au 30 janvier, Getty Institute for the History of Art and the Humanities, Getty Center, Los Angeles ; TANIA MOURAUD, jusqu’au 2 janvier, Armand Hammer Museum at UCLA, Los Angeles ; GILLES BARBIER, jusqu’au 30 janvier, Santa Barbara Museum of Art, Santa Barbara ; ALAIN KIRILI, jusqu’au 2 janvier, California Palace of the Legion of Honor, San Francisco ; VALERY GRANCHER, jusqu’au 31 janvier, Berkeley Art Museum & Pacific Film Archive, Berkeley.
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A la conquête de l’Ouest
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°94 du 3 décembre 1999, avec le titre suivant : A la conquête de l’Ouest