Le peintre Joachim Sandrart a décrit dans son autobiographie une exposition qui aurait eu lieu à Rome en 1631, et aurait rassemblé entre autres des œuvres de Guido Reni, du Guerchin, du Dominiquin, de Poussin et de Sandrart lui-même. Fiction faire-valoir mais aussi vision historique, il a fallu attendre les recherches de Jane Costello, publiées en 1982, et surtout l’article de Dirani, pour démontrer que l’événement n’avait en vérité jamais eu lieu que dans l’esprit de son auteur.
ROME - Cette invention (Sandrart l’a mise au point avec un remarquable sens du détail) et son invraisemblable fortune toute borgésienne, ont donné l’idée à Alain Bonfait, maître de conférence à la Sorbonne, de réaliser, avec autant de précision qu’il était possible (neuf tableaux sur douze sont indiqués explicitement par Sandrart), cette exposition tout droit issue d’un musée imaginaire.
"Rome 1630", qui emprunte le titre de l’essai d’Yves Bonnefoy que republient aujourd’hui les Éditions Flammarion, était aussi l’occasion pour l’Académie de France à Rome de rendre un hommage indirect à Nicolas Poussin, à l’heure de la rétrospective du Grand Palais, puisque Sandrart incluait dans ce panorama de l’art un tableau majeur du maître des Andelys, la Peste d’Azoth, représentée ici par une copie provenant de la National Gallery de Londres.
Le petit nombre des tableaux réunis (grâce en particulier à la Galleria Spada et à la Pinacoteca Capitolina) ne doit pas masquer l’ambition du propos. Toutes les tendances de l’époque sont en effet représentées : le baroque, l’idéalisme classique, le caravagisme, et l’on a ainsi un aperçu saisissant des bouleversements esthétiques que connut Rome au début du XVIIe.
Deux tableaux, dont le merveilleux Diane Chasseresse du Dominiquin (Galleria Borghese), ont été restaurés pour l’occasion, et l’on peut revoir le modeste mais fascinant Midas aux sources du Pactole de Nicolas Poussin, retrouvé il y a quelques années dans les réserves du Musée Fesch d’Ajaccio. Un volumineux catalogue en français et en italien, avec des textes de G. Briganti, Y. Bonnefoy, M. Fumaroli et S. Ebert-Schifferer, est publié par Electa, tandis que des concerts et des conférences autour de l’exposition sont programmés pendant toute sa durée.
"Rome 1630 - il trionfo del pennello", Villa Médicis, jusqu’au 1er janvier.
Yves Bonnefoy, Rome 1630, Éditions Flammarion, 240 p., 450 F.
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La concrétisation d’une légende
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°9 du 1 décembre 1994, avec le titre suivant : La concrétisation d’une légende