La cause des garçons

Pour questionner les figures de l’idéal masculin, le commissaire Frank Lamy réunit une centaine d’artistes hommes internationaux, tant jeunes pousses que créateurs établis, voire stars, qui utilisent des stratégies de résistance (corps mis à mal, travestissements, sexualité débridée, burlesque, mauvais goût…) afin d’aller à l’encontre de l’image établie de l’artiste mâle conquérant, façon Picasso le Minotaure. Ici, le corps devient un terrain de je(u) – beaucoup de plasticiens de la performance (Acconci, Burden, Nauman…) sont convoqués – pour faire de l’art un champ d’expériences dynamitant le regard phallocratique afin de prôner le goût de la différence et des marges. Le cheminement, au sein du parcours, s’il est riche d’enseignement, n’en est pas moins éprouvant. Les pièces, aux médiums très variés (peinture, performance, photo, installation, sculpture, vidéo…), sont accrochées à touche-touche, ce qui a tendance à saturer la rétine. En outre, face à une telle profusion d’artistes ouvertement homosexuels, on finit par se demander s’il faut être forcément gay ou féministe pour bousculer efficacement les valeurs traditionnelles de la masculinité : autorité, héroïsme et puissance.
Malgré certaines redondances et un trop-plein d’œuvres confinant au bavardage visuel, cette expo-somme, à portée politique, s’avère nécessaire. Car, à l’heure où un État protecteur se veut de plus en plus intrusif, y compris dans la vie intime, « Chercher le garçon », cultive un esprit libertaire transgressif qui fait du bien et semble citer un certain Benjamin Franklin que nos chers dirigeants paternalistes feraient bien de se rappeler : « Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour
un peu de sécurité ne mérite ni l’une ni l’autre, et finit par perdre les deux. »