Musée Malraux, Le Havre (76)

Gros temps sur Le Havre

Par Colin Cyvoct · L'ŒIL

Le 28 octobre 2009 - 385 mots

Le musée André Malraux du Havre possède de nombreuses études d’Eugène Boudin, qui fut incontestablement l’un des peintres les plus attentifs à l’infinie variété de la voûte céleste : « Nager en plein ciel. Arriver aux tendresses du nuage. Je sens tout cela venir, poindre dans mes intentions. Quelle jouissance et quel tourment. » Mais le thème ne s’épuise pas avec Eugène Boudin, bien au contraire.

Le musée du Havre propose une savante réflexion sur les diverses formes de représentation photographique des nuages du milieu du xixe siècle jusqu’à nos jours. Les premières prises de vue de ciels posent immédiatement de grandes difficultés. Dès 1851, la technique du « collodion humide » permet de saisir les nuances du ciel, dont l’importante luminosité nécessite un temps de pose très court, alors qu’un temps de pose beaucoup plus long est indispensable pour transcrire les subtilités du paysage terrestre, le ciel apparaissant alors uniforme et presque blanc. Les photographes doivent donc trouver des subterfuges.
 Gustave Le Gray fait sensation en présentant à Londres, en 1856, des paysages composés à partir de deux négatifs, l’un pour le ciel, l’autre pour la partie inférieure de la photo. À la même époque, Charles Marville réalise une subtile série de ciels de Paris, exposée en 1857 à la Société française de la photographie. Héritiers de la tradition de la peinture réaliste, Félix Thiollier et Hans Watzek prennent de nombreux clichés de paysages où le ciel semble être le sujet principal.
Qu’en est-il de la représentation des nuages au siècle d’Hiroshima et de Tchernobyl, alors que les progrès techniques permettent de saisir leur apparence avec précision ? Sous l’impulsion de photographes tels que Alfred Stieglitz, André Kertész et, bien sûr, les surréalistes, le nuage gagne en autonomie formelle et allégorique.
À l’époque contemporaine, le nuage oscille entre deux pôles, l’un lié à l’histoire du paysage (Olivier Mériel), l’autre associé aux métaphores, aux transgressions poétiques ou ironiques (Vik Muniz, Pierre et Gilles). Non loin du musée, l’espace d’art contemporain Le Portique présente une inquiétante installation vidéo et sonore de Laurent Grasso qui met en scène un nuage menaçant les rues de Paris.

« Les Nuages. Là-bas… les merveilleux nuages… Autour des études de ciel d’Eugène Boudin, hommages et digressions », musée André Malraux, 2, boulevard Clemenceau, Le Havre (76), http://.musee-malraux.ville-lehavre.fr, jusqu’au 24 janvier 2010.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°618 du 1 novembre 2009, avec le titre suivant : Gros temps sur Le Havre

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