Grenelle de l’image

Tout juste consommés, nos détritus repartent dans des usines de traitement où ils sont transformés puis « valorisés » avant d’être réinjectés dans le circuit de la consommation. Ainsi va le cycle : collecter/recycler.

Le Centre photographique d’Île-de-France, sis en Seine-et-Marne, montre que ce processus vaut pour un autre matériau de grande consommation : l’image. Chaque jour, des milliards de photographies de presse ou familiales, de publicités et autres documents imprimés sont produits, « utilisés » puis détruits ou relégués aux archives où ils sont oubliés… Jusqu’à ce que des artistes les récupèrent et les « valorisent » à leur tour en les réintroduisant, cette fois, dans le circuit de l’art.

Parmi ces artistes, ceux invités par le CPIF, Mathieu Pernot, Éric Baudelaire, Céline Duval, Ludovic Burel ou encore Stanislas Amand, réfléchissent au statut des images par leur recyclage. Lorsqu’il agrandit des cartes postales des grands ensembles architecturaux d’après-guerre, devenus aujourd’hui les « cités » (Le Meilleur des mondes, 2006), Pernot pointe la beauté d’une utopie, la modernité, en même temps que sa fragilité.

En rapprochant des Scénarios non réalisés, texte d’Antonioni, des « film stills » de vieux films japonais, Baudelaire génère une nouvelle narration, ce qu’il appelle la possibilité d’un film (The Makes, 2008). De narration, il est aussi question dans le travail de Duval qui, après les avoir nettoyées, rapproche des photos anonymes pour leur parenté formelle. On se surprend alors à les regarder comme s’il s’agissait de clichés de Doisneau ou Jahan. Tout en rêvant à l’idée d’un possible Grenelle de l’image.