Giacometti, comparaison n’est pas raison

Paris. C’est entendu. Comme toujours, les œuvres de Giacometti sont magnifiques. Sont-elles pour autant compatibles avec les œuvres de tous les artistes ? Ces dernières années, l’artiste a eu comme partenaires éphémères, Bacon, Picasso ou Bruce Nauman. Ici, il est également en très bonne compagnie. De fait, après les premiers travaux de jeunesse, le parcours met en regard la période cubiste de Giacometti avec celle de Lipchitz et Zadkine. Puis, après une période « primitiviste », les têtes de l’artiste suisse sont confrontées à celles de Bourdelle et Maillol. Si le rapprochement avec le premier, son maître, est parfaitement justifié (chez l’un et l’autre, les têtes sont déformées, décharnées), on peine à trouver un lien avec les pièces plutôt classiques du second. De même, les figures de Giacometti qui forment des groupes tout en restant isolées, ont peu en commun avec la maquette pour Les Bourgeois de Calais de Rodin (1880). C’est que, à la différence de Rodin, dont les personnages ont des attitudes et des expressions variées, ceux de Giacometti semblent enfermés définitivement dans leur univers.

L’exposition, au titre, convenu « Entre tradition et modernité », se termine sur un chef-d’œuvre absolu, L’Homme qui marche (deux versions, 1949 et 1960). Là encore, ces sculptures ont comme voisin Rodin avec Saint Jean Baptiste (1880) : un monde sépare le saint au corps parfait, dont la main esquisse un geste vers l’autre, et le personnage figé dans son socle, confiné dans un ailleurs lointain, inaccessible au regard du spectateur.