Les commémorations nationales façonnent de plus en plus la programmation culturelle. Ces célébrations consensuelles ont en effet l’avantage
de répondre à l’appétence populaire pour l’histoire, de valoriser des sites et de nouer des partenariats entre les institutions.
Pour les organisateurs, les commémorations nationales sont souvent synonymes de records de fréquentation, à l’image des très bons scores réalisés en 2014 par le Centre des monuments nationaux autour de saint Louis. En 2015, une autre figure royale est au cœur de l’actualité : François Ier, dont on célèbre les 500 ans du couronnement et de la victoire à Marignan. Personnalité très populaire et fortement ancrée sur le territoire, il réunit tous les ingrédients pour une programmation tous azimuts, allant du colloque à la BD. À Paris, c’est la BnF qui ouvre les festivités avec une exposition sur la construction de son image royale. Le Musée national de la Renaissance ne pouvait pas non plus passer à côté d’un tel jubilé et a considérablement dopé sa programmation culturelle. Il présente, entre autres, une exposition dédiée à Jacques Galiot de Genouillac, artisan de la victoire de Marignan (du 23 mai au 21 septembre), et une autre consacrée à Louise de Savoie, la mère du roi (du 13 octobre à fin janvier 2016). Dans un tout autre registre, le Centre des monuments nationaux lance en avril un jeu vidéo centré sur le monarque qui se déroule dans les sites du CMN.
La mobilisation du Val de Loire
Mais c’est sans conteste le Val de Loire qui se taille la part du lion dans ce jubilé. Onze monuments du réseau des Châteaux de la Loire, sept châteaux et manoirs associés, six Villes et Pays d’art et d’histoire et quatre villes associées s’unissent pour célébrer le souverain et, plus largement, pour faire rayonner la Renaissance. L’année 2015 est ainsi ponctuée d’événements directement liés au souverain, comme l’exposition très attendue par les bibliophiles « Trésors royaux : la bibliothèque de François Ier », présentée au château de Blois (du 4 juillet au 18 octobre). D’autres expositions explorent des facettes moins connues de son règne, comme « Le Roi et l’empereur », à la cité royale de Loches (jusqu’au 20 septembre), ou ses relations avec la famille Brissac, au château éponyme (jusqu’au 31 octobre). Une reconstitution historique de la fête de cour conçue par Léonard de Vinci pour célébrer la victoire de Marignan aura également lieu pendant l’été à Romorantin puis au Clos Lucé, sous la houlette du très sérieux Centre d’études supérieures de la Renaissance. Chambord, le château le plus intrinsèquement lié à François Ier, maintient en revanche son positionnement sur l’art contemporain et invite Guillaume Bruère à dévoiler sa vision du monarque (jusqu’au 30 août). Dans le reste de la programmation, le roi est en revanche davantage un prétexte pour évoquer la Renaissance. Expositions, concerts, spectacles et ateliers, plus ou moins étroitement liés à François Ier, animeront ainsi le territoire jusqu’à la fin de l’année. Malgré la dimension marketing de certains projets, les organisateurs demeurent relativement sages par rapport à nos voisins. Ainsi même le lancement d’une cuvée spéciale de vin François Ier puise de lointaines racines dans l’introduction locale du cépage par le roi.
Traditionnellement, les commémorations autour d’un artiste échappent en revanche au folklore et se résument presque exclusivement à la tenue d’une exposition blockbuster. La difficulté croissante à obtenir des prêts n’est évidemment pas étrangère à cette focalisation sur un événement phare, tout comme la déférence dont jouissent les grands maîtres en France. Le 350e anniversaire de la mort de Nicolas Poussin (1594-1665) ne déroge pas à la règle, et toute l’attention se concentre sur l’exposition du Louvre. Même Les Andelys, ville natale de Poussin qui possède un musée éponyme, ne propose pas de manifestation spécifique hormis un partenariat éditorial avec l’hebdomadaire local L’Impartial. Le Louvre a opté pour un parti pris très scientifique : explorer la peinture religieuse de l’artiste, pan peu connu de son œuvre. La manifestation dresse ainsi l’état de la recherche la plus actuelle sur ce corpus longtemps occulté par les historiens au profit des créations profanes. Mais pour ses commissaires cette ambition scientifique n’est pas antithétique avec une vocation grand public. « Les œuvres religieuses de Poussin sont plus accessibles que ses tableaux mythologiques, elles fonctionnent sur une émotion plus immédiate », explique Nicolas Milovanovic, conservateur au Louvre. En offrant une nouvelle approche, l’exposition espère démocratiser un peintre réputé ardu et savant tout en donnant à voir une centaine de chefs-d’œuvre, pour certains totalement inédits en France, dont La Mort de la Vierge.
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François Ier et Poussin, héros nationaux
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°679 du 1 mai 2015, avec le titre suivant : François Ier et Poussin, héros nationaux