Hasard du calendrier muséal, l’art textile semble réoccuper le devant de la scène.
Au Musée de Cluny, à Paris, la tenture de La Dame à la licorne vient de se refaire une beauté, et on ne compte plus les expositions illustrant la prodigieuse créativité des artistes contemporains réinventant la discipline : présenté au Musée d’art moderne de la Ville de Paris, « Decorum » transcende avec brio les frontières entre arts décoratifs et design. S’inscrivant dans le droit-fil de ce nouveau regard, le Musée d’art et d’histoire de Genève tisse un stimulant dialogue entre une série de tapisseries flamandes du XVIIe siècle mettant en scène de grandes figures de l’Antiquité romaine et les sources visuelles qui ont probablement inspiré leurs auteurs : livres et gravures anciennes, armes contemporaines, monnaies et médailles antiques, mais aussi pièces archéologiques et collections de moulages. Face à ces grandes machines théâtrales qui ont tout du péplum (le souffle épique, la verve narrative, le sens du drame), le visiteur se sent soudain transporté dans une Antiquité de fureur et de sang, aux antipodes des poussiéreux manuels scolaires…
Mais au-delà de la somptuosité de leur palette (qu’une récente restauration effectuée dans les ateliers De Wit, en Belgique, a ressuscitée), ces magnifiques œuvres d’art tissées de fils d’or et d’argent adressaient à leurs contemporains des messages politiques et moraux. Transportés dans le siècle de Louis XIV et revêtus de leurs « manteaux de gloire » (qui doivent plus aux drapiers flamands qu’aux modes vestimentaires antiques !), les empereurs Titus, Vespasien ou Constantin étaient érigés en modèles de courage et d’éthique. De l’Antiquité à la Contre-Réforme, les lissiers baroques ont bel et bien franchi le Rubicon !
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Fragments de discours textiles
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Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 2 mars 2014, Musée Rath, Place Neuve, Genève, www.ville-ge.ch/mah
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°665 du 1 février 2014, avec le titre suivant : Fragments de discours textiles