Florilège du dessin

D’abord, parce que sa collection n’est habituellement pas visible ; elle appartient à un collectionneur privé, l’un des plus importants collectionneurs actuels : Jean Bonna, grand bibliophile devant l’éternel, que la collection de livres – une partie de cette collection sera exposée à partir du 21 avril à la bibliothèque de l’Arsenal, à Paris – aura peu à peu amené à faire l’acquisition de gravures puis, depuis une trentaine d’années, de dessins… C’est ce dernier pan de collection qui est montré à Lausanne. Ensuite, parce que le dessin est chose fragile et donc rarement montré. Jusqu’à présent, la collection de dessins de Jean Bonna n’avait été dévoilée qu’à la découpe : les feuilles françaises aux Beaux-Arts de Paris (dans le cabinet qui a pris le nom du banquier suisse) en 2006 ; les feuilles nordiques à la Fondation Custodia (Paris) en 2008… Cette fois, à Lausanne, est présenté un florilège des plus belles feuilles de la collection, sans distinction – ou alors par salles – d’écoles, de périodes, de techniques. Et il n’est finalement pas si courant de passer, au cours d’un même accrochage, d’un Brueghel l’Ancien à un Callot, d’un Poussin à un Renoir, d’un Moreau à un Natoire, d’un Rembrandt à un Vallotton… et l’on peut comme cela enchaîner les noms prestigieux : Degas, Dürer, Chardin, Courbet, Fragonard, Gauguin, Goltzius, Manet, Raphaël, Van Gogh, Watteau, tous y sont. Tous sauf les absents : Michel-Ange, Vinci – il y a bien une Tête de Leda mais « d’après » et non « de » Léonard – et Rodin. Picasso aussi. Mais où est donc Picasso ? Mais là n’est pas le propos. Le propos, c’est d’apprécier dans le cadre familier d’une ancienne maison de maître les plus belles feuilles de la collection d’un amateur, dont plusieurs Redon magnifiques un Baldung Grien à tomber des nues !