Au début des années 1960, les deux grandes capitales que sont Paris et Londres ont chacune attiré d’importantes vagues d’immigration.
Ces flux migratoires se sont traduits par des apports culturels, notamment musicaux, très significatifs. Pour retracer l’histoire de ce métissage poly-phonique, « Paris-Londres, Music Migrations » suit une ligne narrative en trois chapitres, de l’émergence de ces influences sur les scènes parisiennes et londoniennes à « l’âge d’or de la sono mondiale » en passant par les luttes antiracistes rythmées par ces nouvelles sonorités. Rock, raï, reggae-punk, makossa, électro-rap, mais aussi ska, R&B, zouk… la bande-son s’écoute en direct ou au casque, ou encore via les nombreuses archives audio-visuelles. Afin d’éviter autant que possible le côté figé des instruments et des costumes épinglés sous vitrine, cette exposition très dense – plus de 600 documents, photographies, objets et œuvres d’art – a recours à des rapprochements inattendus, voire à des gags visuels, comme ces quatre perruques balayées par le courant d’air d’un ventilateur évoquant quatre fameux garçons dans le vent (Reconstitution 2: A Hard Day’s Night, d’Arnaud Maguet en 2013). La dérision n’est cependant pas de mise dans une exposition qui vise, au contraire, à valoriser la richesse des croisements culturels, comme s’y emploie avec succès le documentaire commandé au compositeur, producteur et réalisateur Martin Meissonnier. Ce collaborateur ponctuel de Manu Dibango, Papa Wemba, Khaled ou de Robert Plant et Jimmy Page, signe ici une jolie galerie de portraits de personnalités musicales connectées des deux côtés de la Manche. « Nous avons eu la chance de bénéficier de prêts assez exceptionnels d’institutions comme le Victoria and Albert Museum, mais aussi d’ensembles issus de collections personnelles de musiciens (dont celle de Manu Dibango) ou de séries photographiques, comme celle de Syd Shelton », ajoute le commissaire général de l’exposition Stéphane Malfettes.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°726 du 1 septembre 2019, avec le titre suivant : Exposition polyphonique