Espace « archi » pictural

L’architecture a toujours entretenu des liens privilégiés avec les peintres à travers le genre très particulier de la veduta ou vue de ville. Aujourd’hui, on ne peut pas dire que nos contemporains renouent avec ce genre, mais ils lui donnent une nouvelle extension. Tel est le point de départ d’une collaboration entre deux centres d’art, Le Plateau à Paris et le Camden Art Center à Londres qui ont uni leurs forces dans la démonstration de cette « archipeinture ».
À Paris, la déclinaison du thème se fait sans répétition avec une précision parfois austère. Ce qui frappe, c’est l’intérêt majeur de ces artistes de toutes générations, pour l’habitat multiple et la ville. Peu ou pas de maison représentée, la culture pavillonnaire ne séduirait-elle que les photographes ?
En tout cas, les rares projections de logement individuel passent par la maquette chez Andrew Lewis, la caravane dans la toile du jeune allemand Matthias Weischer ou la modélisation géométrique de son compatriote Ulf Puder. L’exposition est ainsi dominée par les architectures modernes et fonctionnalistes à l’image d’Yves Bélorgey dont la pratique picturale prend pour unique sujet des ensembles d’architecture.
La ville dynamique et hybride agite les cimaises du centre d’art, sous les coups de pinceaux de Franz Ackermann ou Julie Mehretu. Le premier présente des voyages urbains où la vitesse et le fracas des couleurs rappellent la vigueur futuriste tandis que les compositions gigantesques font tourbillonner les références et les images avec une énergie digne des dessins du surréaliste Roberto Matta.
La force de l’exposition est là, dans cette variété formelle, ces élans de couleurs et de rapidité contrebalancés par des vues plus statiques et réflexives d’emboîtements architecturaux. Certaines cohérences elliptiques entre les œuvres peuvent laisser de marbre mais l’ensemble jouit cependant d’un bel élan articulé avec une sélection judicieuse de vidéos.