Après le passage d’Antoni Gaudí sur terre, Barcelone ne put jamais retrouver son calme. Des maisons semblent toujours s’apprêter pour aller danser, la salamandre ornée de trencadis – mosaïque d’éclats de céramiques colorés – continue de faire rire les enfants au Park Güell, et la Sagrada Familia est chaque jour plus luxuriante, depuis plus d’un siècle qu’on continue de la construire.
À peine franchie la porte de l’exposition que consacre le Musée d’Orsay à l’architecte catalan, né dans une famille de chaudronniers en 1852, on se retrouve face au vestibule monumental d’un appartement de la Casa Mila, remonté pour la première fois, dont les courbes de chêne sculpté surmontent des portes vitrées ou des bancs. Bienvenue chez Gaudí ! Le parcours nous invite à serpenter dans son univers, depuis ses premiers projets jusqu’au projet qui l’occupa de 1910 à la fin de sa vie, en 1926 : une église, sans arcs-boutants, soutenue par une forêt de piliers, à l’image des arbres et de leurs branchages, dédiée à la Sainte Famille (la Sagrada Familia). On découvre sa bibliothèque, on regarde les dessins de Viollet-le-Duc, qui s’inspire de la sculpture médiévale en transformant un escargot en cul-de-lampe et en faisant s’étendre un crocodile sur une rampe d’escalier, et l’on pénètre dans l’atelier de Gaudí, détruit par un incendie en 1936, et reconstitué dans une projection 3D, avec ses moulages et ses maquettes pour la Sagrada Familia. Mais on s’émerveille surtout de son mobilier fabuleux – comme l’étonnante coiffeuse aux pattes animales, semblant prête à s’animer et courir, créée pour l’épouse d’Eusebi Güell, son grand ami et mécène –, de ses dessins, de ses projets qui ne seront pas réalisés, de ses vitraux et de ses étonnants objets liturgiques qui nous invitent à suivre le cheminement de ce créateur mystique et à l’inscrire dans son époque. Mais sans doute est-il moins aisé d’exposer un architecte qu’un peintre, et l’on sort de cette exposition avec un certain sentiment de manque. De même qu’en exposant une œuvre littéraire, on espère surtout éveiller le désir de la (re)lire, ce parcours qui nous éclaire sur la création de Gaudí, creuse aussi notre faim : celle de revoir Barcelone.
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En attendant Gaudí
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°755 du 1 juin 2022, avec le titre suivant : En attendant Gaudí