Parce que, de toute sa vie, il n‘en est quasiment jamais sorti, Jean-Paul Sartre a dit du Tintoret qu‘il était le « séquestré de Venise ». La formule pourrait tout aussi bien s‘appliquer à Emilio Vedova qui y est né en 1919 et qui ne l‘a jamais quittée hormis pour de brefs séjours à l‘étranger. Fort mal connue en France, son œuvre n‘en est pas moins omniprésente dans toutes les grandes manifestations internationales. La gestualité abstraite qui la caractérise depuis plus de quarante ans, comme en témoigne l‘exposition anthologique que lui consacre le château de Rivoli, se démarque de l‘expressionnisme abstrait américain par la charge politico-existentielle qui la fonde. Autodidacte, irrésistiblement inspiré par le peintre de la Scuola di San Rocco mais aussi par les prisons de Piranèse, Vedova développe tout d‘abord un art fait de dessins d‘architectures et de perspectives de ruines, et adhère dès la fin des années trente au groupe Corrente qui rassemble la culture d‘opposition au régime fasciste. Au lendemain de la guerre, Emilio Vedova entame tout un travail de Géométries noires qui l‘impose comme l‘une des figures abstraites les plus fortes de l‘époque. Par-delà la polémique qui persiste en Italie entre réalisme et abstraction, Vedova fait cavalier seul et multiplie la pratique de la série. Sa démarche vise à dépasser la bidimensionnalité du tableau au bénéfice d‘un engagement spatial plus complexe, au sein duquel le corps n‘a de cesse d‘être mis en jeu. Le geste est ample, le coup de brosse nerveux, la matière picturale généreuse. Quelque chose de vital est à l‘œuvre chez lui.
TURIN, Castello di Rivoli, 17 octobre-17 janvier.
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Emilio Vedova, anthologie
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°500 du 1 octobre 1998, avec le titre suivant : Emilio Vedova, anthologie