« Mon ami sublime » : c’est ainsi que Paul Éluard s’adresse à Pablo Picasso quand il lui dédicace son recueil Le Livre ouvert.
À Saint-Denis, le Musée d’art et d’histoire Paul Éluard, en partenariat avec le Musée Picasso de Barcelone et celui de Paris, retrace l’amitié profonde qui lia le peintre et le poète, jusqu’à la mort de ce dernier, en 1952. Éluard et Picasso se rencontrent dès les années 1920, mais c’est au cours de la décennie suivante qu’ils se rapprochent. Une série de portraits dessinés d’Éluard par Picasso, exceptionnellement réunis pour l’exposition, des peintures, des poèmes, des lettres, leurs œuvres communes, des photographies de Dora Maar, un émouvant film en couleurs, tourné par Man Ray à Mougins à la fin des années 1930, où apparaissent les deux amis et leurs bien-aimées – Nusch Éluard et celle qui n’est pas encore « La femme qui pleure » – témoignent de l’affection joyeuse qui unit les deux amis, en même temps que de sa fécondité artistique. Quand viendra le temps des larmes et des guerres – celle d’Espagne et la Seconde Guerre mondiale –, la lumière de ces années les aura assez nourris pour irradier leurs nouveaux engagements communs – dont témoignent le poème d’Éluard sur Guernica et le chef-d’œuvre de Picasso, ou les livres illustrés créés ensemble. Après-guerre, les désirs de liberté et de fraternité des deux hommes se cristalliseront dans le rêve communiste. L’exposition se clôt sur une photographie de l’enterrement d’Éluard en 1952, et la douleur de Picasso. « Qu’un ami véritable est une douce chose ! », nous murmure La Fontaine. Et que sa perte est cruelle.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°741 du 1 février 2021, avec le titre suivant : Éluard-Picasso, une amitié sublime