Du corps dans son rapport au social

Ainsi qu’en témoignait notamment l’exposition « Altérité/Identité », organisée par Jean Clair à l’occasion du centenaire de la Biennale de Venise en 1995, le corps est au centre d’une très grande part de la création contemporaine de la fin de ce siècle. Parmi les œuvres qui illustrent un tel état de fait, on observe que nombre d’entre elles « manifestent une conception de l’individu dans sa dimension et sa définition sociales, au lieu de le caractériser d’abord par ses affects ou son identité a-contextuelle ». Telle est du moins la réflexion qui a conduit Éric de Chassey à concevoir l’exposition intitulée « Corps social », présentée en septembre sur les cimaises de la galerie de l’École nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris. Si le propos n’est pas franchement novateur, il a du moins le mérite de pointer un aspect de la problématique du corps – « Comment donner corps au corps social ? » – qui n’a pas vraiment été posé pour lui-même dans l’actualité de ces dernières années, alors même que cette relation au social constitue l’un des vecteurs les plus sensibles de notre époque. À preuve, la réunion d’œuvres que de Chassey a organisée, structurée selon « trois modes ou options  : la représentation, la métaphore et le modèle abstrait ». De Ghada Amer à David Urban, en passant par Bélorgey, Jouve, Katz, Les Parleuses et Tatah parmi d’autres, celle-ci regroupe des artistes d’horizons culturels très divers et mêle les pratiques artistiques. Elle est ponctuée de quelques références aînées (comme Martial Raysse) qui opèrent en qualité d’échange sans rien instruire pour autant d’une quelconque tutelle. Simple manière d’articuler historiquement la démonstration.