Le Frac Bourgogne a depuis l’an dernier une nouvelle directrice, Eva Gonzalez-Sancho, spécialisée dans les rapports entre l’architecture, l’art et l’action publique comme en témoigne sa programmation 2003-2004 : à l’automne, elle signait sa première exposition manifeste, « 1:1 x temps – quantité, propositions et fuites » et faisait pleinement participer le bâtiment du Frac, avec une pièce d’Ann Veronica Janssens en creux. Puis Guillaume Leblon pendant l’hiver s’est attaqué carrément à un autre mur, qu’il a ouvert sur le jardin voisin pour offrir un très beau regard sur le lieu. Et avant le grand remue-ménage de Lara Almarcegui à l’été, on peut s’attendre à ce que la star portugaise Pedro Cabrita Reis (deux fois pavillon national à la Biennale de Venise en 1995 et 2003) questionne encore le Frac Bourgogne. Cabrita Reis travaille toujours avec ce qui l’entoure, force les endroits qui l’accueillent pour mieux y installer la poésie de ses installations de matériaux recyclés et de néons. Cabanes, jardins, labyrinthes, il se plaît à construire des sculptures qui questionnent toujours l’architecture des lieux.
À Venise en 2003, il s’était installé dans un bâtiment ancien de la Giudecca avec des structures géométriques blanches, ouvertes et irradiées par la blancheur des néons (Longer Journeys), un ensemble longitudinal entre sculpture minimale et ville constructiviste en matériaux de récupération. Dans les jardins, un bâtiment de tôle presque aveugle surprenait par son côté simple et spirituel. Les parois internes d’Absent names étaient recouvertes de tubes lumineux blancs créant un moment hors du temps, profond, grave, personnel. Cette fois-ci à Dijon, il projette de réaliser un True garden, le troisième du nom, qui colonisera de façon aléatoire tout l’espace d’exposition avec deux cents modules de briques et autant de tubes fluorescents. Pour lui, l’architecture s’est substituée à la nature qui nous servait auparavant de repère et de mesure, normal dans ce cas que son jardin véritable voie pousser des cheminées. Pedro Cabrita Reis a ce don de faire de ses installations des condensés de mélancolie, d’émotion, de mémoire sans qu’elles soient pathétiques.
Il sait redonner sens à l’espace, revaloriser notre corps grâce à ces colonies d’éléments architecturaux de toute beauté, dans un équilibre et un dépouillement finalement plus cistercien que minimal. Ainsi, en ramenant la ville par fragment dans un lieu, il réinstaure un dialogue entre elle et le spectateur au sein du silence quasi religieux et de la sérénité intense qui caractérisent ses constructions. Un moment de zen et de reconnaissance surtout.
« Pedro Cabrita Reis », DIJON (21), Frac Bourgogne, 49 rue de Longvic, tél. 03 80 67 18 18, jusqu’au 5 juin.
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°558 du 1 mai 2004, avec le titre suivant : Domaine d’extension