Dieric Bouts superstar

Démonstration à Louvain où, en lieu et place d’une classique monographie, le Musée M s’aventure dans un projet original mais hélas bancal. Pour célébrer la figure de l’immense Dieric Bouts (1415-1475), l’établissement a ainsi imaginé une exposition déroutante, promettant de révéler l’héritage visuel de ce visionnaire dans l’imaginaire contemporain. Ses bouleversants christs de douleur sont, par exemple, confrontés à des portraits de sportifs, afin d’interroger la fabrication des icônes et le processus d’héroïsation. Honnêtement, même Eddy Merckx et Marco Pantani semblent bien se demander ce qu’ils fabriquent au milieu de ces saintes images. Même digression pour les vierges à l’Enfant plus émouvantes les unes que les autres, qui se retrouvent mêlées à des clichés de pop stars dans le but de montrer la persistance iconographique du motif de la diva par-delà les siècles. Pas sûr que la Madone aurait pensé être un jour comparée à Beyoncé ! On pourrait multiplier les exemples aussi peu probants tout au long du parcours. L’ambition, on s’en doute, c’est de souligner l’actualité de cette peinture. Mais ce génie du Moyen Âge, dont les images demeurent en effet terriblement efficaces, n’a pas besoin de ce gadget qui sonne faux pour revendiquer sa puissance et sa radicalité. Il ne faut pourtant pas se laisser décourager par ce parti pris agaçant et essayer d’en faire abstraction pour savourer ces sommets de la peinture. Malgré cette composition baroque, l’exposition demeure en effet un rendez-vous immanquable pour les amoureux des primitifs flamands. Les opportunités d’admirer une telle concentration de chefs-d’œuvre de ce maître sont en effet bien trop rares pour se priver de cette réunion d’anthologie. Outre les trésors conservés dans les collections belges, le musée est en effet parvenu à rassembler quelques-uns des plus beaux tableaux et dessins de Bouts, à commencer par ses sublimes portraits qui sidèrent par leur inaltérable modernité.