Desvallières, de l’enfer au paradis

Amateurs d’art ou néophytes, croyants ou agnostiques, courrez au Petit Palais découvrir le peintre George Desvallières (1861-1950). Quatre-vingt-dix œuvres égrainées au fil d’un parcours chronologique relatent une carrière singulière qui, avant de devenir exclusivement religieuse, fut d’abord profane. La césure a lieu pendant la Grande Guerre, qui lui coûtera un fils et décuplera sa foi. L’exposition rétrospective, la première du genre, illustre ces deux versants picturaux qu’a priori tout oppose. En guise d’introduction, de très beaux portraits témoignent de la dette envers Jules-Élie Delaunay, son premier maître. Passé ensuite chez Gustave Moreau, le jeune Parisien produit d’ambitieux pastels tels Les Tireurs d’arc, médaillé à l’Exposition universelle de 1900. Trois ans plus tard, un voyage à Londres marque une rupture avec le symbolisme des débuts. Après la série des Femmes de Londres, suivent des portraits de Parisiennes croquées dans les allées du Moulin-Rouge avec aussi peu de complaisance qu’un Toulouse-Lautrec. Le monde désenchanté qu’il découvre à Montmartre n’est peut-être pas étranger à sa conversion en 1904. L’année suivante, sort de sa palette un redoutable Sacré-Cœur que n’aurait pas renié Matthias Grünewald. Ce chef-d’œuvre expressionniste annonce ses ambitions supérieures dans le domaine de l’art sacré dont il fera, au côté de Maurice Denis, son grand œuvre d’après-guerre. À coups de pinceau ravageurs, Desvallières flagelle la toile de ses tableaux capables d’émouvoir le plus sceptique des spectateurs.