« On lui dit déconne, déconne, mon petit ! Ça s’appelle associer », a lancé un jour le psychiatre François Tosquelles.
« Ce qui caractérise la psychanalyse, c’est qu’il faut l’inventer. L’individu ne se rappelle de rien. On l’autorise à déconner. » Déconner ? Pourtant, lorsque ce docteur catalan arrive en France en 1939, fuyant comme 500 000 républicains espagnols réfugiés la victoire franquiste après trois années de guerre civile, il se retrouvera comme beaucoup interné dans un camp : l’heure n’est pas à la déconne, mais aux cris et aux larmes. Au camp de Setfonds, où il passe plusieurs mois, ce lecteur de Lacan ouvre un service psychiatrique de fortune. C’est là, sans doute, le début de cette vocation qui le conduira à la fois à transformer les institutions psychiatriques et à participer à l’histoire de l’art moderne en créant à l’asile des conditions favorables à l’émergence de l’art brut. À travers dessins ou sculptures, photographies, films, écrits, archives, l’exposition « Déconniatrie. Art, exil et psychiatrie autour de François Tosquelles » raconte cette extraordinaire aventure humaine et artistique. En 1940, Tosquelles arrive à l’hôpital de Saint-Alban-sur-Limagnole : là, il décide avant tout de soigner l’institution. À une époque où les malades des hôpitaux psychiatriques français sont voués à une « extermination douce », par privation de nourriture, il ouvre les portes de l’asile et envoie ses malades travailler aux champs. Mais aussi, il met en place des activités communes, comme le cinéma ou la revue interne Trait-d’union. Des écrivains et artistes, comme Paul Éluard ou le peintre Jean Fautrier, viendront y trouver refuge pendant la guerre. Plusieurs malades se mettront bientôt à créer, comme Auguste Forestier et Marguerite Sirvins, qui deviendront des figures importantes de cet art brut conceptualisé par Jean Dubuffet. Des œuvres et installations contemporaines concluent le parcours, revendiquant le « droit au vagabondage »… et à la déconniatrie. On déconne et on est conquis.
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Déconne, mon petit !
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°749 du 1 décembre 2021, avec le titre suivant : Déconne, mon petit !