À l’âge de vingt-six ans, dès lors que ses parents l’autorisent à se consacrer entièrement à la peinture, Jean-Baptiste Camille Corot s’inscrit en 1822 dans l’atelier d’Achille-Etna Michallon, puis, après la mort brutale de ce dernier, chez Jean-Victor Bertin. Précurseurs d’une peinture de paysage pure et absolue, ces deux-là ne manquent pas de recommander à leur élève d’aller travailler en plein air.
De cette époque datent ses premières peintures dans la forêt de Fontainebleau où il ne cessera de revenir tout au long de sa vie. Des Détails de troncs d’arbres en forêt (1822) à la Carrière abandonnée (1850) en passant par les Gorges d’Apremont (1834), c’est un véritable portrait de paysage qu’il nous en donne.
Inventaire détaillé de la topographie bellifontaine
Sans le savoir, Corot initiait là un mouvement qui allait prendre une ampleur considérable, et faire entrer notamment les noms de Barbizon et de Chailly au panthéon de l’histoire de l’art. Quelque temps plus tard, Alexandre Desgoffe allait vanter les mérites de la Vue du massif des Trois-Pignons (1835), Narcisse Diaz de la Peña célébrer Les Rochers de la Belle Épine (vers 1840-1845, lire p. 124) et Théodore Rousseau rendre hommage à Un vieux chêne (1852).
Ce faisant, ces artistes ont dressé comme un inventaire détaillé de la forêt, recensant sites et essences d’arbres – Paysage boisé : Bois-Bréau à Chailly de Leprince (1825), Les Hauteurs du Jean de Paris de Diaz de la Peña (1867), Pins et Bouleaux de Constant Dutilleux (vers 1855), etc.
Quand la photographie décida à son tour de s’emparer des charmes de la forêt, celle-ci devint l’objet d’études encore plus attentives. Alors qu’Eugène Cuvelier se saisit d’un orage (vers 1860) qui passe et que Georges Balagny se penche sur des Arbres morts au milieu des rochers, Gustave Le Gray plante le pied de son appareil de photo pour fixer une Étude de troncs (1855).
Si la forêt de Fontainebleau est éminemment le lieu de toutes sortes de sujets sur la nature, elle est aussi le cadre d’une activité de l’homme. Tantôt laborieuse, comme l’attestent La Hutte du charbonnier de Théodore Rousseau (1850) ou Les Scieurs de bois de Jean-François Millet (1850-1852), tantôt pastorale comme l’illustre cette Bergère et son troupeau de Charles Jacque, tantôt oisive à l’image de fameuses scènes de pique-niques.
À cet égard, il revient à Claude Monet avec sa version du Déjeuner sur l’herbe (1865-1866, voir page précédente) d’y avoir accompli l’un des tableaux les plus importants de sa jeune carrière. C’est dire la dette qu’il doit à son aîné Corot et comment celui-là, plus que tout autre, en jetant son dévolu sur la forêt de Fontainebleau a non seulement nourri son œuvre d’un thème singulier, mais assuré le genre du paysage d’une extraordinaire fortune critique.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
De Corot à Monet, en passant par Le Gray, la forêt de Fontainebleau invite à travailler sur le motif
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°590 du 1 avril 2007, avec le titre suivant : De Corot à Monet, en passant par Le Gray, la forêt de Fontainebleau invite à travailler sur le motif