Chan Ky-Yut, une vision émerveillée

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 1 février 2004 - 370 mots

Jeux de lignes et de taches, de transparences et de densités, de pleins, de vides et de déliés,
les aquarelles de Chan Ky-Yut revendiquent leur liberté. Quoiqu’elles soient instruites de la savante collusion entre culture orientale et culture occidentale, entre calligraphie et gestualité, elles déterminent un espace propre. Influencé par les techniques de méditation taoïste et zen qui privilégient le rapport de l’individu à l’univers, Chan Ky-Yut a trouvé dans l’aquarelle bien plus qu’une simple pratique. Elle s’est imposée à lui comme le terrain d’exercice idéal d’un mode de pensée qui lui permet d’être à l’écoute du monde.
De sa respiration et de son souffle. De ses humeurs et de ses rumeurs. De ses silences et de ses stridences. Qu’est-ce qui fait ici trace : le pinceau ? la couleur déposée sur la feuille de papier ? ou bien la main qui tient le pinceau chargé de couleur ? Rien de moins certain que d’affirmer qu’il s’agit plutôt de l’un que l’autre, et l’on dirait plus volontiers qu’il y va d’une seule et même entité, d’un seul et même instant, qui font tout à la fois de la main, du pinceau et de la couleur un seul et unique vecteur. L’art de ce Chinois originaire de Shanghai, installé depuis de très nombreuses années au Canada, révèle une vision émerveillée qui lie étroitement l’ordre et le chaos, l’organique et le structuré, le cri et la raison, dans la mise au monde d’images abstraites dont le flux et le reflux attestent une dynamique fondamentale. Voire existentielle. « Prendre pour cible l’indicible – imiter l’illimité » note le poète Vahé Godel en marge de l’œuvre du peintre. Fou de poésie, Chan Ky-Yut – qui multiplie la confection de livres d’artistes – l’est aussi de lumière et d’espace. Quel que soit leur format, réduit ou monumental, ses aquarelles accordent au blanc une place privilégiée. « Parce que le blanc, dit Chan Ky-yut, c’est absolument comme le soleil, comme la lune, comme l’air, d’une manière infiniment douce et suave. » On dit ordinairement du blanc qu’il est réserve ; chez lui, il est réserve d’espace.

« Chan Ky-Yut », ISSY-LES-MOULINEAUX (92), médiathèque, 33 rue du Gouverneur-Général Éboué, tél. 01 41 23 80 69, 10 janvier-29 février.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°555 du 1 février 2004, avec le titre suivant : Chan Ky-Yut, une vision émerveillée

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