Les contrées froides et lointaines ont indubitablement un pouvoir d’attraction sur les artistes contemporains.
On se souvient, en 2005, de l’expédition en Antarctique du Français Pierre Huyghe et de l’intrigant film qu’il en avait tiré, A Journey That Wasn’t. À l’opposé, c’est dans le cercle polaire arctique et plus précisément sur l’île norvégienne de Sandhornøya qu’avait ouvert, fin août, une nouvelle manifestation baptisée « Salt » – « sel » en norvégien –, mêlant diverses disciplines tels l’architecture, les arts plastiques et la musique. Le lieu, une immense plage de sable blanc avec, en toile de fond, une abrupte et haute montagne, est assurément spectaculaire : « Vous pouvez, aujourd’hui, voir de l’art contemporain dans pas mal d’endroits dans le monde, mais très rarement dans ce genre de paysage », assurait alors Helga-Marie Nordby, commissaire Arts plastiques de Salt, laquelle avait confié l’exposition inaugurale à l’architecte finlandais Sami Rintala (Rintala Eggertsson Architects) et à l’artiste chinois Yang Fudong. Le premier s’était inspiré des traditionnels fiskehjell ou séchoirs à poisson pour dessiner une splendide « salle » d’exposition en plein air de 150 m de long sur 12 m de haut, constituée de cent dix arches de bois. Le second, fan d’Ingmar Bergman, est venu filmer in situ un mois durant pour ensuite réaliser une installation cinématographique intitulée The Light That I Feel (« La lumière que je perçois »), projetée en boucle dans huit « cabanes » dotées d’un large écran qui, dès la nuit tombée, s’animait recto verso.Outre sa durée – prévue, à l’origine, jusqu’au 6 septembre 2015 –, l’originalité de cette manifestation était son itinérance, un voyage de huit ans dans divers pays du cercle arctique : le Groenland en 2016, puis l’Islande, les îles Féroé, l’Irlande, l’Écosse, le Spitzberg, l’Alaska, enfin la Russie, chaque escale voyant son contingent d’artistes renouvelé. Or, dès cette halte inaugurale en Norvège, le programme a été rudement mis à mal. Le 26 septembre, en effet, la première tempête d’automne de l’année a détruit la majeure partie des installations, obligeant les organisateurs à suspendre temporairement la manifestation. Depuis, ces derniers mettent tout en œuvre pour pouvoir relancer « Salt » en janvier 2015, y compris à travers un système de Crowdfunding [« financement participatif »].
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°675 du 1 janvier 2015, avec le titre suivant : Cercle polaire « ar(c)tistique »
