Délaissée par un certain public qui pense à tort qu’elle reste figée dans ses traditions, la tapisserie suit au contraire de près l’évolution des événements historiques comme des mouvements artistiques.
Proposant un parcours qui déroule un siècle de créations textiles réalisées dans les manufactures nationales des Gobelins, de Beauvais et de la Savonnerie, cette exposition est un reflet particulièrement éloquent des faits marquants et des recherches techniques qui, tout au long d’un siècle, ont inspiré les artistes dans l’élaboration de leurs cartons. Salle après salle, sur d’imposantes fresques de laine hautes en couleur, les œuvres traitent d’une série de thèmes comme la rupture des deux guerres, le goût pour l’ailleurs exotique (L’Asie de Pierre Dubreuil), les grandes expositions de 1925 et de 1937 présentant l’excellence du savoir-faire des ateliers, la modernité toujours en marche, la parenthèse de l’Occupation, le renouveau esthétique promu notamment par Lurçat. Après 1950, sollicités pour répondre aux attentes des manufactures, de nombreux peintres tels Matisse, Derain, Léger, Hartung, Manessier, sortis des codes classiques et travaillant en lien étroit avec les lissiers, signent de magnifiques tapisseries, réunies à l’étage. Le regard ne manque pas d’être interpellé par des expérimentations souvent exceptionnelles visuellement et par les dernières explorations jouant avec la matière, comme les compositions de Vasarely, le Murlux de Nicolas Schöffer ou la Sainte Sébastienne de Louise Bourgeois.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°715 du 1 septembre 2018, avec le titre suivant : Cent ans d’art tombés des métiers