NICE
Le Musée Jules-Chéret expose les toiles réalisées par la peintre lors de deux séjours niçois dans les années 1880.
Nice. Le Musée des beaux-arts Jules-Chéret, qui tient son nom du célèbre affichiste de la Belle Époque, est situé un peu à l’écart du cœur de la ville niçoise. En attendant les travaux de restauration à venir, le lieu, bien que légèrement décati, ne manque pas de charme. Sous la direction de Johanne Lindskog, conservatrice du patrimoine, l’équipe a développé un programme de recherche dynamique visant à sortir de l’ombre les femmes artistes que l’histoire de l’art a oubliées.
Ce n’est cependant pas le cas de Berthe Morisot (1841-1895), qui a eu l’honneur d’une rétrospective au Musée d’Orsay en 2019. Pourtant, malgré sa participation à la plupart des expositions impressionnistes historiques, elle n’a jamais atteint la notoriété de ses confrères masculins. Ce n’est guère surprenant lorsqu’on lit la lettre envoyée par Édouard Manet à Henri Fantin-Latour à propos des sœurs Morisot – avant de se marier, Edma avait aussi pratiqué la peinture. Pour Manet, les demoiselles Morisot sont charmantes, mais il regrette qu’elles ne soient pas des hommes.
Heureusement, les mentalités ont évolué ; désormais, face aux portraits réalisés par Berthe Morisot de sa fille Julie, qui fut pratiquement son unique modèle, les critiques s’intéressent à l’artiste et non plus seulement à la mère.
L’exposition se concentre sur les œuvres réalisées durant les deux séjours de Morisot à Nice, en 1881-1882 et 1888-1889. C’est un bel effort, surtout quand on sait que celles-ci, majoritairement détenues par des collections privées, sont dispersées à travers le monde. Selon l’historienne de l’art et commissaire Marianne Mathieu, assistée par Jeanne Pilon, ces paysages semi-urbains, à la différence d’autres impressionnistes, ne font pas abstraction de certains détails caractéristiques de la ville de villégiature (Le Port de Nice, 1882 ; La Plage de Nice, 1882, [voir ill.]). Plus important encore, ces œuvres d’une délicatesse extrême et d’une grande richesse chromatique ont peu à envier à certaines petites toiles de Renoir, ami proche de Morisot, qui sont également présentées ici.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°639 du 20 septembre 2024, avec le titre suivant : Berthe Morisot sur la Côte d’Azur