NICE
Berenice Abbott (1898-1991) se distingue des figures majeures de la photographie du XXe siècle par sa capacité à exceller dans tous les domaines, du portrait à la photographie documentaire ou scientifique.
Les diverses facettes de son travail collent à sa vie, à son tempérament. Embrasser sa carrière de manière non chronologique, tel est le parti pris en ces lieux, en commençant par son retour à New York en 1929 après avoir commencé sa carrière à Paris. Subjuguée par les nouveaux buildings qui s’élèvent, la beauté et la vitalité de la ville, la coexistence de l’ancien et du moderne, Abbott s’engage dans un travail photographique qu’elle ambitionne « d’être documentaire aussi bien qu’artistique ». Dans la lignée d’Atget, dont elle a sauvé le fonds, Abbott dans « Changing New York » impose une vision constructiviste qui fait la part belle à la grandiosité des ouvrages et aux savoir-faire de l’homme. Les grands tirages argentiques sur papier baryté réalisés par la photographe dans les années 1970 y font rentrer de plain-pied. Toutefois, montrer dans un deuxième temps, et surtout juxtaposer dans une même salle les portraits réalisées à Paris ou aux États-Unis avec ses photographies scientifiques, qu’elle entame à partir de 1939, ne favorise pas une lecture claire de son parcours. À moins de prendre le temps de lire les textes explicatifs et d’écouter Abbott parler de sa carrière dans le film formidable qui lui fut consacrée à l’orée de ses 90 ans. Conçue par Dichroma Photography, société madrilène spécialisée dans la conception et l’itinérance d’expositions photo, « Berenice Abbott », qui finit sa course à Nice, donne plus l’impression d’un emboîtage de propos et de séries que d’un récit. L’absence de traduction en français des verbatim d’Abbott inscrits en anglais sur les murs pose d’ailleurs question. Reste le grand plaisir ressenti devant chaque image.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°719 du 1 janvier 2019, avec le titre suivant : Berenice Abbott, topographie d’un talent