Plus d’un siècle après la mort du géographe visionnaire, communiste anarchiste et pionnier de l’écologie Élisée Reclus (1830-1905), le duo de plasticiens Alexandre et Florentine Lamarche-Ovize, invités au Drawing Lab par la commissaire indépendante Solenn Morel, lui rend hommage en créant une installation immersive inédite.
Celle-ci, par le biais de dessins foisonnants, de peintures hautes en couleur, de céramiques flottantes et d’assises poétiques figurant des motifs naturels tels que montagnes et cascades d’eau, nous plonge dans un concentré de paysage, réconciliant le fragment et l’universel. Fidèles à l’esprit aventureux de ce touche-à-tout talentueux qu’était Reclus, parti de sa Gironde natale pour voyager à travers le monde (Italie, Algérie, États-Unis, Canada, puis Brésil, Uruguay et Argentine…) afin de dresser des cartographies embrassant toute la diversité de la nature, perçue telle une réalité vivante et sociale, les deux plasticiens nous invitent à une promenade géographique et artistique où il fait bon vivre. Éprouvant et contemplant tantôt une brume lumineuse, tantôt l’empreinte des dents sur une pomme croquée ou encore une mangrove aux entrelacs fascinants. Passé le portrait d’Élisée en guise d’introduction, le circuit donne à voir, à hauteur d’homme, sans jamais surplomber son sujet (la célébration de la richesse du monde), une amplitude plastique très diversifiée, fusionnant sans hiérarchie art et artisanat, qui est tout à fait raccord avec la pensée libertaire, ouverte sur les autres et sans frontières, du fort attachant Reclus, par ailleurs ami de William Morris, fondateur du mouvement Arts and Crafts.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°729 du 1 décembre 2019, avec le titre suivant : Aux champs, Élisée