PARIS
« S’apercevant que sa fin était proche, il ne songea plus qu’à s’occuper des vérités de notre bonne et sainte religion catholique […]. Le roi, qui le visitait souvent avec amitié, survint alors […]. Tout à coup, il lui prit un de ces paroxysmes avant-coureurs de la mort. Le roi se leva et lui tint la tête pour alléger son mal mais, comme si ce divin artiste eût senti qu’il ne pouvait espérer un plus grand honneur sur cette terre, il expira dans les bras du roi. Il avait soixante-quinze ans. »
Léonard de Vinci s’éteint donc le 2 mai 1519 dans le château du Clos Lucé. Ce jour-là, François Ier ne pouvait nullement se trouver à son chevet, le roi étant à Saint-Germain-en-Laye le 3 mai, à deux jours de route d’Amboise. C’est Vasari, premier biographe de Vinci, qui invente cette fiction ; un pieux mensonge, en vérité, pour signifier que seul un royal sein pouvait recevoir son dernier souffle divin. Il faudra attendre 1781 pour qu’un autre peintre, François-Guillaume Ménageot, en fasse le sujet d’un tableau d’histoire, forcément celle de France, et que l’agonie de Vinci ne devienne un thème à succès repris au XIXe siècle par Heim, Gigoux et encore Ingres, qui en fit un chef-d’œuvre du genre troubadour. Mais si François Ier ne devait pas recueillir l’ultime confession du peintre, c’est bien lui qui, en faisant venir l’artiste florentin à la cour de France, a fini d’écrire sa légende. Rien ne prédestinait en effet cet enfant autodidacte, né illégitime dans le village de Vinci, près de Florence, à mourir de l’autre côté des Alpes dans les bras du rival de Charles Quint. Rien, excepté ce que l’on appelle, faute de mieux, le « génie ». Car comment nommer autrement cette disposition surnaturelle qui fait de Léonard de Vinci, 500 ans après sa disparition, l’artiste le plus universel qui soit ? Comment expliquer que l’auteur d’un corpus de moins de vingt tableaux, pour la plupart inachevés, soit l’auteur du chef-d’œuvre absolu : la Joconde ? Comment justifier aussi qu’en dépit des milliers de pages de dessins et d’écrits légués par le maître, Léonard de Vinci demeure toujours insaisissable ? Comment comprendre, enfin, qu’un tel artiste ait pu gâcher autant de son temps et de son talent dans l’organisation de spectacles fugaces ou dans l’invention de machines utopiques ? Il est temps de commencer l’autopsie du génie Vinci…
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Autopsie d’un Génie
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°727 du 1 octobre 2019, avec le titre suivant : Autopsie d’un Génie