L’air y était chaud, et presque rare. Dans la touffeur du Magasin 80, gigantesque entrepôt échoué sur les docks intimidants, la ville réunionnaise du Port a récemment hébergé sa troisième Biennale de l’art, du design, de la création numérique et immatérielle.
Là, du 12 novembre au 11 décembre 2011, vingt-huit artistes dûment sélectionnés par un jury international ont présenté une œuvre, ou un ensemble d’œuvres, élaborant un aperçu significatif des scènes émergentes.
Périclès local, Alain Séraphine a imaginé cette biennale comme un espace d’échanges, comme une agora esthétique où chaque artiste, au terme d’une résidence à La Réunion de quelques mois, doit apporter sa pierre à l’édifice culturel. Un espace démocratique, en somme. Ici, donc, une vidéo explorant les paysages entraperçus de l’île (Cheng Ran) ; là, encore, une installation cylindrique, à l’image du panorama du XIXe siècle, enserrant le regardeur, entre ciel et terre, entre chien et loup (Tania Ximena Ruiz).
Sous la plage, les pavés. Issus de Malaisie, du Brésil et du Mali, mais aussi de Chine et d’Inde, ces jeunes plasticiens exprimèrent la polysémie politique d’un Sud économique longtemps négligé. Mais, à en croire l’intensité et l’allégresse des œuvres – un cheval immaculé et surdimensionné (Min Thein Sung), un délicieux jardin luxuriant (Lu Ying) –, les latitudes sont toujours fragiles et les tropiques jamais tristes.
Au Port, il fut souvent question de transmission, de transition. Un pont suspendu de pailles colorées (Stéphanie Hoareau), un passage piéton comme une forme itérative (Du Yan). Le franchissement vidéographique des océans (Paula Restrepo), l’affranchissement cinématographique des esclaves (Luck Razajoana). D’un espace l’autre, d’un monde l’autre. Inégalées, les six photographies de l’artiste colombienne Alexa Vanegas font des usines désaffectées de l’île des chimères insolées, des présences solarisées. La canne à sucre n’est plus, la sève s’en est allée, et pourtant suinte encore la vie. Quand isolement n’est pas solitude. Bouleversant.
Magasin 80, Enceintes portuaires, Le Port (La Réunion), du 12 novembre au 11 décembre 2011.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Australe biennale
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°643 du 1 février 2012, avec le titre suivant : Australe biennale