La photographie contemporaine allemande est encore largement conditionnée par l’enseignement de Berndt et Hilla Becher. Ce couple d’artistes s’était rendu célèbre dans les années 70 pour leurs séries de photographies noir et blanc sur des typologies d’architecture industrielle. L’objectivité est alors élevée au rang de vertu essentielle. De tous les étudiants formés par ce couple à Düsseldorf, trois sont dorénavant des artistes respectés de la scène internationale : Thomas Struth, Thomas Ruff et surtout Andreas Gursky. Dès la première salle de l’exposition consacrée à ce dernier par la Serpentine Gallery, on retrouve ce fameux principe de photographie documentaire. Chez lui le point de vue reste éloigné. La chambre photographique est en effet toujours placée à une certaine hauteur. Les êtres humains avec leur dimension réduite donnent l’échelle de ces vastes paysages. Les lieux, zones d’activité périurbaine, bases de loisirs, antichambres des grandes institutions sont restitués dans des tirages grands formats. Néanmoins, malgré la grande beauté de ces photographies, on ne peut s’empêcher de trouver ces images décevantes lors d’un examen plus attentif. Destinée sans aucun doute à contrebalancer l’extrême banalité des scènes et l’anonymat des hommes, la beauté des prises de vues constitue leur propre faiblesse. Une trop grande objectivité court toujours le risque d’être détruite par une volonté de créer du beau. Or, l’évolution de cet artiste, clairement visible dans les dernières salles, tend de plus en plus vers une esthétisation du motif. Ici, rien de grotesque ou de dramatique. L’image se confond avec l’iconographie publicitaire de nos murs. Seule l’extraordinaire qualité des tirages sauve cette photographie de tout formalisme.
LONDRES, Serpentine Gallery, jusqu’au 7 mars. À lire : Andreas Gursky, éd. Schirmer et Mosel, 131 p., 498 F.
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Andreas Gursky ou la banalité du beau
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°504 du 1 mars 1999, avec le titre suivant : Andreas Gursky ou la banalité du beau