Et si l’histoire artistique de Paris était contée par Londres ? L’initiative est prise par la Royal Academy of Arts, qui propose une exposition couvrant la période 1900-1968. La durée est vaste mais l’accent est mis sur les années 1960-1970 afin de reconsidérer les faits et de mettre en avant la capitale française face à la place prépondérante habituellement accordée à New York.
LONDRES - L’Exposition universelle de 1900 confirme la position de Paris comme ville artistique et intellectuelle, statut qui s’est poursuivi jusqu’au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. La capitale, comme l’Europe tout entière, se retrouve exsangue. Les années à venir s’annoncent difficiles. Et pourtant, à travers l’exposition présentée à la Royal Academy of Arts, Sarah Wilson, commissaire générale, tente de démontrer que, malgré la guerre et le “triomphe de l’art américain”, Paris continue à jouer un rôle important jusqu’aux événements de 1968 qui marquent le début des incertitudes de fin de siècle.
Vaste, le sujet justifie un accrochage dense, qui propose presque trois cents œuvres et près de deux cents artistes représentés, illustrant la capitale et son activité. Le parcours choisi est chronologique et géographique, s’appuyant sur des quartiers parisiens emblématiques de la période. Montmartre est présenté comme l’un des creusets des avant-gardes européennes qui inspire fauves et cubistes, Vlaminck peint Danseuse au Rat mort, tandis que Picasso revisite le Sacré-Cœur. Après la Première Guerre mondiale, Montparnasse et ses cafés attirent les artistes de tous pays, souvent exilés. L’atmosphère est cependant tendue. Le Cadeau de Man Ray n’est guère plus rassurant que Pygmalion d’André Masson, l’un des surréalistes. Sous l’Occupation et après la Libération, Saint-Germain-des-Prés et le Quartier latin sont les lieux d’une intense activité artistique. Alors que New York donne le jour à l’Expressionnisme abstrait, Paris ne reste pas en marge, certains Américains viennent même s’y installer, aussi bien marchands qu’artistes – comme Christo –, convaincus que la capitale n’a pas perdu de son prestige. L’heure y est à l’Abstraction géométrique, à l’Art cinétique ou encore au Nouveau Réalisme. Parallèlement, la Figuration narrative s’épanouit aussi bien au travers de l’œuvre de Bernard Rancillac que de Martial Raysse ou bien de Jacques Monory qui reprennent des icônes de la société de consommation, à l’image du Pop’ Art outre-Atlantique. En 1967, la production artistique parisienne témoigne de l’épanouissement de la capitale et de son engagement culturel. De plus, l’ouverture, en 1977, du Centre Pompidou, ouvre de nouvelles perspectives.
Cette rétrospective offre un nouveau regard sur Paris et, de façon générale, sur l’art moderne en relançant l’antagonisme entre Paris et New York. Également présentée au Guggenheim Museum, à Bilbao, du 21 mai au 3 septembre, elle ouvre la voie à de nouvelles recherches. L’histoire de l’art de la fin du XXe siècle n’a pas fini d’être écrite.
- PARIS CAPITALE DES ARTS 1900-1968, jusqu’au 19 avril, Royal Academy of Arts, Burlington House, Piccadilly, Londres, tél. 44 20 7300 8000, tlj de 10h à 18h, jusqu’à 22h le vendredi, catalogue version française, Hazan, 72 euros, ISBN 2-85025-798-2.
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Allô Paris, ici Londres
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°144 du 8 mars 2002, avec le titre suivant : Allô Paris, ici Londres