L’exposition de l’Institut italien ne permet malheureusement pas d’appréhender à sa juste mesure le travail de Franco Albini, designer très connu dans les années 1950.
PARIS - On connaît peu, sinon mal, en France, l’œuvre de Franco Albini (1905-1977), « l’architecte des équilibres instables », comme aimait à le définir l’historien de l’art napolitain Cesare de Seta. Diplômé du Politecnico de Milan en 1929, ce fils d’ingénieur rompu à la technique et doué pour le dessin fut pourtant le maître d’œuvre transalpin le plus connu des années 1950. L’exposition « Franco Albini, la substance de la forme » proposée par l’Institut culturel italien, à Paris, tente de réparer quelque peu cet oubli, à travers une sélection de photographies, de dessins et de mobilier. Le visiteur y découvre un créateur des plus prolifiques, depuis une ligne de couverts jusqu’à l’architecture, en passant par une télévision (Brionvega) ou un luminaire (AM/AS). Ainsi, Franco Albini est notamment l’auteur, avec son associée Franca Helg, de l’aménagement de la ligne 1 du métro de Milan (1962-1964) : des éclairages des stations aux bancs d’attente, des garde-corps aux cendriers ou porte-parapluies, sans oublier la signalétique, le tout dans une élégante sobriété.
Engagé dans le Mouvement moderne, Albini incarne néanmoins ce courant néorationaliste italien des années 1930 qui cherche à marier fonctionnalisme européen et patrimoine classique de la Péninsule. On peut voir, ici, des photos d’un chalet de vacances construit à Cervinia, le refuge Pirovano (1952), lequel est juché sur d’étonnants pilastres mêlant formes fonctionnalistes et architecture vernaculaire, et celles, dans un registre beaucoup plus strict, des grands magasins La Rinascente, à Rome (1961).
De fait, Franco Albini est aussi un pionnier du design italien. Son credo : réinventer des typologies en accord avec une « poétique fondée sur le défi de la pesanteur ». Ici présenté, son meuble le plus célèbre n’est autre que la bibliothèque Veliero [« Voilier »], datant de 1940, structure tendue de verre et de filins d’acier qui, de profil, ressemble effectivement à un trois-mâts, avec sa multitude de haubans. D’autres meubles témoignent de sa remarquable sensibilité aux matériaux, tel le fauteuil Margherita, en rotin et quasi en apesanteur. Ou la chaise Luisa, dont on peut voir la structure en bois astucieusement dessinée.
Présentation pauvre
La présentation est toutefois un peu faiblarde. Déjà l’an passé à la même époque, l’exposition sur Carlo Mollino (lire le JdA no 431, 13 mars 2015) avait été montée sur le même principe, à savoir : une multitude de panneaux de carton plume au format identique – pour une question de transport sans doute – sur lesquels sont fixées les photographies ; peu sinon pas de textes ; enfin, quelques meubles, pour Albini en l’occurrence, non des originaux mais des éditions actuelles, en majorité celles du fabricant italien Cassina, sponsor de la présentation. Un principe qui ne suffit pas à entrer pleinement dans le travail de ce créateur hors pair, et à peine à le survoler. C’est dommage ! Pour combler le manque, il faudra « plonger » dans le catalogue, ou, pour les plus intrépides, faire le voyage à… Gênes, où Franco Albini a conçu, dans les années 1950 et 1960, quatre musées emblématiques : le Palazzo Bianco, le Palazzo Rosso, le Museo del Tesoro et le Museo di San’Agostino.
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Albini, maestro de l’apesanteur
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Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 30 mai, Institut culturel italien, 73, rue de Grenelle, 75007 Paris, tél. 01 44 39 49 39, du lundi au vendredi 10h-13h, 15h-18h.
Légende photo
Vue de l'exposition « Franco Albini - La sostanza della forma », à l'Institut culturel italien, Paris. © Cassina.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°455 du 15 avril 2016, avec le titre suivant : Albini, maestro de l’apesanteur