Un florilège des tableaux satiriques de Peter Saul à la Fondation Salomon.
ALEX - À 78 ans, Peter Saul porte un regard toujours aussi mordant et malicieux sur le monde. Il faut le voir monter quatre à quatre l’escalier du château d’Arenthon, à Alex (Haute-Savoie), que lui a ouvert la Fondation Salomon et l’écouter raconter, d’un œil espiègle, les anecdotes associées à chaque tableau. Jean-Marc Salomon, le président de la Fondation, a sélectionné une cinquantaine de toiles réalisées au cours des vingt dernières années. On ne verra donc pas les tableaux politiques des années 1960 qui dénonçaient la guerre du Vietnam lorsque l’artiste séjournait à San Francisco en pleine période de contestation hippie. Mais Peter Saul a aujourd’hui d’autres cibles politiques, le George Bush de l’invasion de l’Irak ou la Condoleezza Rice qui torture un prisonnier d’Abou Ghraib. Ça cogne dur et l’on comprend que celui qui se revendique extrémiste de gauche n’est pas toujours en odeur de sainteté dans son pays. D’autant qu’il n’est pas tendre non plus avec le rapport particulier que ses compatriotes entretiennent avec l’argent et la nourriture, une constante dans ses thématiques.
Peter Saul vise l’efficacité sémantique et visuelle. Aucun mode d’emploi n’est requis pour comprendre ses messages. Il tire de la caricature et de la BD son graphisme singulier et reconnaissable entre tous. C’est une peinture outrancière qui s’assume pleinement. Ses personnages aux trognes déformées exhalent leur cupidité ou leur gloutonnerie. Et lorsqu’il parodie des tableaux célèbres de l’histoire de l’art, c’est pour mieux stigmatiser les travers humains. C’est Mona Lisa qui vomit des macaronis ou de la pizza, ou l’Olympia de Manet qui se goinfre d’un cake, tout comme sa servante d’ailleurs. Les toiles aux couleurs clinquantes et acidulées, heureusement disposées par section, trouent littéralement les murs blancs du château. Il faut aussi lire la préface qu’il a tenue à rédiger pour le catalogue et dans laquelle il explique sa position singulière sur l’échiquier de la création contemporaine. « C’est de ma faute si on m’ignore » – sous-entendu la critique d’art –, écrit-il, admettant son malaise à l’égard de l’expressionnisme abstrait ou de l’art minimal, et confessant une ressemblance non voulue avec le pop art. Il aurait pu se rassurer en relevant qu’il a inspiré de nombreux artistes, à commencer par ceux de la Figuration narrative.
Jusqu’au 11 novembre, Fondation Salomon, 191, route du Château, 74290 Alex, tél. 04 50 02 87 52, www.fondation-salomon.com, du jeudi au dimanche de 14h à 19h. Catalogue à paraître.
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Affreux, sales et méchants
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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°375 du 21 septembre 2012, avec le titre suivant : Affreux, sales et méchants