Accéder au Roi-Soleil

Ordonnées chronologiquement, les six étapes de l’ascension sociale de celle qui est née Françoise d’Aubigné sont comme les six marches de l’accession au trône de la future marquise de Maintenon. Aussi intelligente qu’intrigante, la marquise qui épousa le sulfureux et alors très en vogue poète Scarron ne mettait, selon ses propres dires, « aucune borne à ses désirs ». À ses qualités innées d’éducatrice, elle ajouta une habileté quasi stratégique à user des réseaux. Sous les pinceaux des peintres qui l’ont approchée, Madame de Maintenon apparaît au fil des années comme une jeune femme parée de perles, la gouvernante attentive des enfants royaux illégitimes, une sainte romaine au port de reine, une veuve âgée coiffée d’un bonnet de taffetas noir. Mignard et Jouvenet signent sans conteste les plus beaux portraits de celle que Louis XIV épouse en secret en 1683. L’original de la lettre attestant cette union a été retrouvé par hasard en 2015. Des recueils, des sculptures et des textiles documentent l’existence à la cour de cette étoile de première grandeur qui brilla de tous ses feux auprès du monarque solaire. Critiquée pour son rôle politique et moral joué en sous-main, elle inspira les pamphlétaires et les graveurs. Une petite planche la caricature en moine vulgaire, la bouche ouverte, les yeux vitreux. Elle fonda la célèbre maison d’éducation de Saint-Cyr. Une huile élégante et précise d’Édouard Pingret montre Racine faisant répéter Esther aux Demoiselles de Saint-Cyr. La favorite du souverain s’employa à détruire sa correspondance et ne laissa pas de mémoires. « Je resterai une énigme pour le monde », disait-elle. Pas tout à fait, car cette exposition, si elle ne les lève pas tous, dissipe beaucoup de doutes à son endroit.