Cet été encore, domaines, châteaux et autres merveilles historiques se font l’écrin de quelques étonnantes pépites d’art contemporain ! Les riches parcours proposés par le festival In Situ et le centre d’art de Chaumont-sur-Loire sont l’occasion de nouvelles belles balades estivales.
Pour les amoureux d’art contemporain qui seront d’humeur bleue et désireux de faire le plein de culture en même temps que de verdure, le domaine de Chaumont-sur-Loire est la destination idéale ! Créé en 2008, ce centre d’arts et de nature a fondé sa renommée sur une triple identité mettant à l’honneur le patrimoine, l’art et les jardins, à travers deux événements majeurs qui ponctuent le printemps et l’été : le Festival international des jardins et la Saison d’art. Celle-ci offre, pour sa 12e édition, une sélection de treize artistes plasticiens qui investissent l’intérieur du château et les extérieurs où les œuvres dialoguent avec les jardins qui s’étendent sur plus de 30 hectares. Qu’il soit spécialiste ou grand public, adulte ou enfant, le visiteur aura le plaisir d’y découvrir des pièces nouvelles mais aussi de redécouvrir d’anciennes créations peut-être déjà vues, puisque le centre d’art possède aussi une quarantaine d’œuvres permanentes commanditées aux plus grands noms de l’art français et international, (de Sarkis à Giuseppe Penone, d’Andy Goldsworthy à El Anatsui).
Le parcours proposé, dont la programmation repose comme chaque année sur une ligne verte, est particulièrement enchanteur dans les jardins. Très différente d’une expérience de l’art confinée dans un white cube, cette balade plonge le visiteur dans un état de méditation qui attise les sens, la perception des œuvres se mêlant à la présence du végétal et de l’eau, à ses mille parfums, bruits et couleurs. Une magie du lieu à laquelle répond celle des œuvres, sélectionnées avec exigence pour la force de leur contenu poétique, leur dimension sensible et leur lien avec la nature. Dénominateur commun, en effet, les matériaux utilisés sont souvent l’eau, le bois ou la pierre, tout comme les sujets sont poético-écologiques, porteurs d’une réflexion sur l’environnement et la planète. Parmi les interventions à ne pas rater, dans l’Asinerie, les fantomatiques lianes de cordes tressées réalisées par la Brésilienne Janaina Mello Landini qui évoquent la forêt amazonienne et la douleur des arbres violentés. Dans la grange aux abeilles et la galerie basse du Fenil, sont aussi à découvrir les installations oniriques et poétiques de Stéphane Thidet : ici, Les pierres qui pleurent suspendues à des cordes, qui s’égouttent lentement au-dessus d’un sol argileux de couleur rouge y dessinant un tableau évolutif et aléatoire ; là, Il n’est pas d’obscurité donne à voir, entre ombre et lumière, d’hypnotiques figures formées par le passage d’une ampoule de verre flottant à la surface d’un bassin rempli de lentilles d’eau. Autre rêverie poétique, dans la Cour de la ferme, les sculptures de Ma Desheng interrogent la fragilité et l’équilibre précaire de la condition humaine.
Un peu plus au sud, le festival In Situ offre également quelques haltes incontournables dans les plus beaux sites d’Occitanie, pour la plupart classés à l’Inventaire des monuments historiques. Pour cette 8e édition, l’habituelle commissaire Marie-Caroline Allaire-Matte s’associe à un second commissaire, Pascal Pique, afin de rayonner sur l’ensemble de la région, des Hautes-Pyrénées jusqu’au Gard. Qualité, diversité et singularité sont à nouveau au rendez-vous à travers un choix pertinent d’œuvres qui résonnent de façon sensible et cohérente avec les lieux. Parmi les sites naturels à (re)découvrir : la grotte de Bédeilhac et la Bambouseraie en Cévennes (Générargues). Par son bestiaire magique et ses figures archétypales, faites de matériaux récupérés porteurs de mémoire, le travail de Lionel Sabatté résonne particulièrement avec l’univers pariétal. Dans la grotte de Bédeilhac, l’artiste installe Human Condition, ensemble de sculptures humanoïdes filiformes, vestiges intemporels qui interrogent le devenir de l’humanité, entre ruine et construction, passé et avenir. Avec son foisonnement d’espèces végétales, où s’étendent sur plus de 10 hectares paysages tropicaux et forêt de bambous, la Bambouseraie est un écrin d’exception qui invite au voyage. Une balade qui vaut déjà en soi le détour, pour ceux qui ne connaissent pas ce lieu magique, et au cours de laquelle le visiteur découvrira les sculptures de l’artiste Roland Cognet, faites de cèdre et de séquoia, hommage rendu au passage du temps et au cycle de la nature.
Le festival In Situ, c’est aussi la possibilité de redécouvrir la magnificence des lieux historiques et de leur architecture, certaines œuvres invitant à d’étonnantes expériences en dialoguant avec la mémoire et la monumentalité des espaces. Là, à nouveau, abstraites ou figuratives, tantôt traditionnelles, tantôt audacieusement contemporaines, les propositions variées répondront aux goûts de tous. À ne pas manquer, pour ceux qui s’intéressent aux nouveaux médias et aux technologies, la vidéo de Mircea Cantor et l’intervention virtuelle de Miguel Chevalier. Le premier expose son récent film dans la forteresse de Salses, témoignage de l’architecture militaire espagnole du XVIe siècle : sur le thème de la défense du territoire et de l’environnement, cette vidéo met en scène un aigle dont l’instinct de chasseur le pousse à traquer un drone sans connaître la nature de l’objet. C’est dans la cathédrale Notre-Dame de Rodez, joyau de l’art gothique, que Miguel Chevalier, artiste qui utilise l’informatique comme moyen d’expression, installe son œuvre de réalité virtuelle générative : Digital Supernova projette sur les voûtes de la nef, du transept, de la croisée du transept et du chœur de la cathédrale, un entrelacement de réseaux sinueux et lumineux qui se superposent avec des cartes du ciel imaginaires et d’éclatantes explosions d’étoiles ; une débauche de couleurs et de lumières qui sublime la beauté du lieu, permettant au visiteur de redécouvrir cette vertigineuse cathédrale. et qui accentue l’élévation céleste et la sensation d’infini.
Quant aux sensibilités plus classiques, soulignons la présence de la tête de lion en résine réalisée par Ugo Schiavi, installée dans la cour du Palais des archevêques, à Narbonne, fragment qui fait écho aux vestiges archéologiques, et les poétiques visages et morceaux de corps sculptés en albâtre par Sofie Muller, dans le Musée lapidaire de l’abbaye de Gellone, à Saint-Guilhem-le-Désert : réflexion sur le corps et la mémoire qui résonne parfois directement avec l’histoire du lieu, comme la règle de saint Benoît, dont les préceptes « Prie et travaille » sont une invitation à la lecture divine et au travail de la main, ici matérialisés par les blocs de pierre d’où surgissent une main, une oreille ou une bouche.
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Respirer l’art pur
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°725 du 1 juillet 2019, avec le titre suivant : Respirer l’art pur