Kader Attia, Yto Barrada, Ulla von Brandenburg et Barthélémy Toguo concourent pour le prix Marcel Duchamp 2016. Pour la première fois, les quatre nommés, et pas simplement le lauréat, bénéficient d’une exposition commune au Centre Pompidou jusqu’en janvier prochain. C’est d’ailleurs à Beaubourg, et non plus à la Fiac, que sera proclamé le gagnant le 18 octobre à 18h.
Kader Attia
Observer et réparer les corps, dans leur acception physique ou psychique, telle est l’une des préoccupations récurrentes du travail de Kader Attia (né en 1970). Cette problématique de la réparation sert une nouvelle fois d’ancrage à sa réflexion pour le projet imaginé pour le prix Marcel Duchamp. À travers un nouveau film et une série de sculptures, il s’intéresse à la question de l’absence liée au traumatisme consécutif à la perte d’un membre, qui fréquemment se traduit par le phénomène dit du « membre fantôme » par les scientifiques ; à savoir la sensation, pour une personne amputée, que ce membre est toujours relié au corps et continue à agir en lien avec le reste. Partant, Kader Attia étend métaphoriquement cette problématique à l’échelle d’un monde fragmenté par les chocs de l’histoire – esclavage, colonisation, génocides… – et les secousses politiques et sociales qui en découlent aujourd’hui encore, dans une période particulièrement instable et pleine de soubresauts.
Yto Barrada
Toujours très attentif à la poésie des formes, qu’elles soient le fruit de gestes conscients ou de l’intervention du hasard et de facteurs extérieurs, l’œuvre d’Yto Barrada (née en 1971) scrute les terreaux culturels et leur rôle dans la construction et la définition des identités. Ceci en ne s’intéressant pas seulement aux objets, usages et représentations qui constituent la norme, mais en observant également les à-côtés. Son projet pour le prix Marcel Duchamp s’intéresse au personnage de l’ethnologue française Thérèse Rivière, qui fut active au cours de l’entre-deux-guerres et officia essentiellement en Afrique du Nord, d’où elle rapporta quantité d’images et d’objets avant de finir par être internée. En reconstituant la chambre imaginaire de ce personnage, Yto Barrada ne s’intéresse pas seulement à une activité de scientifique, mais entend également s’atteler au genre biographique, comme pour mieux dresser une analogie entre les activités de l’artiste et celles de l’ethnologue.
Barthélémy Toguo
C’est à une confrontation entre art et sciences que conduit le projet imaginé par Barthélémy Toguo (né en 1967) pour sa participation au prix Marcel Duchamp. Intitulé Vaincre le virus, il s’approche de deux fléaux qui touchent durement l’Afrique : Ebola et le sida. De manière métaphorique, l’artiste s’est attaché à la symbolique ambivalente de l’eau, à la fois symbole de pureté, mais également vecteur possible de contamination – s’agissant d’Ebola –, en vue de faire fabriquer en Chine dix-huit vases surdimensionnés de plus de deux mètres de hauteur, en porcelaine émaillée, qui fonctionnent comme autant de modélisations de cellules en 3D issues de documents scientifiques et d’observation au microscope de cellules infectées. Fruit d’échanges avec des chercheurs de l’Institut Pasteur, l’installation donne en outre à voir une longue table sur laquelle sont disposées des reproductions de cellules infectées par le VIH, réalisées en frittage de poudre à l’aide d’une imprimante 3D.
Ulla von Brandenburg
Passionnée par les héritages culturels, les cérémonies populaires ou encore les rituels donnant lieu à des actions et des rassemblements collectifs, Ulla von Brandenburg (née en 1974) se joue des perceptions temporelles et de la retransmission de la réalité dans un travail qui intègre autant une dimension spatiale que filmique ou picturale. C’est la forme du tableau vivant qui constitue la matrice
de It Has a Golden Sun and an Elderly Grey Moon, sa proposition pour le prix Marcel Duchamp. Avec une volonté manifeste de brouiller les frontières entre l’image et l’expérience concrète, le réel et sa représentation supposée, est projeté un nouveau film dont l’action se déroule au cœur d’une structure pyramidale qui se trouve dupliquée dans l’espace et sur laquelle le spectateur peut prendre place afin d’assister à la projection. Comme une manière d’effacer encore un peu plus les frontières, sont dispersés dans l’espace physique des accessoires eux aussi utilisés dans le film.
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Les nommés du prix Marcel Duchamp 2016
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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°465 du 14 octobre 2016, avec le titre suivant : Les nommés du prix Marcel Duchamp 2016