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PARIS [15.01.15] – Après trois ans de retard et un budget multiplié par deux, le bijou acoustique et architectural de Jean Nouvel a enfin été inauguré. En dépit des efforts fournis pour terminer les travaux à temps, c’est une Philharmonie encore en chantier qui s’est présentée le 14 janvier. Jean Nouvel a boudé l’inauguration.
Mercredi 14 janvier 2015, le bâtiment de la Philharmonie de Paris, à cheval entre le Parc de la Villette et le boulevard périphérique, grouillait encore de centaines d’ouvriers. A l’extérieur, qui présente une façade toujours partiellement dénudée et cernée d’engins de chantier, mais aussi à l’intérieur, où l’on entrevoit en arrière-plan d’espaces flambants neufs et achevés d’autres espaces où s’agitent les ouvriers casqués sur leurs véhicules clignotants au rythme du piaulement des engins. Même dans la grande salle symphonique, on peint, on perce encore. Pourtant, c’est le soir même qu’aura lieu l’inauguration en présence de François Hollande.
Jean Nouvel aurait voulu attendre la fin des travaux pour ouvrir la Philharmonie. Il a pour cela d’ailleurs refusé d’assister à la cérémonie d’inauguration du 14 janvier 2015. « Aujourd’hui, la Philharmonie ouvre. Trop tôt. Sans que le bâtiment soit achevé, sans tests acoustiques de la salle, selon un planning qui ne permet pas de respecter les exigences architecturales et techniques. Contre tous les avis que j’ai pu émettre depuis 2013 », déplore-t-il dans un communiqué. Depuis trois ans, la date d’inauguration du site n’a cessé d’être repoussée et cette ouverture semble se faire prématurément et dans l’urgence.
En 2015, ce grand projet du quinquennat de Nicolas Sarkozy dont l’ouverture était prévue pour 2012 devait enfin ouvrir après plusieurs échéances non respectées. Le projet lui-même ne date par d’hier : c’est en 2006 que l’Etat et la Ville de Paris ont annoncé officiellement leur volonté d’offrir à Paris une Philharmonie avant de lancer, un an plus tard, un concours international d’architecture, que remporte Jean Nouvel. Les travaux commencent en 2009, mais sont interrompus en février 2010, faute de financement de la part de l’Etat, avant de reprendre en 2011. Jusqu’en 2015, les retards s’accumulent. Laurent Bayle entend « parachever la façade » dans les deux ou trois mois à venir. Outre des retards de livraison, le budget, largement dépassé (plus de 336 millions d’euros au lieu des 173 prévus initialement) a également été l’objet de critiques. Jean Nouvel se garde de toute responsabilité à ce sujet : « Je tiens à affirmer qu'en aucun cas je n’ai été à l'origine d'un quelconque dépassement de budget sur ce projet ».
Sous l’envol d’oiseaux stylisés et le tressage de bandes d’inox ondulées de la façade, l’édifice de Jean Nouvel est destiné à accueillir l’Orchestre de Paris en résidence principale. Il est pensé, « bien plus que comme une simple salle de spectacle », comme un complexe comprenant, sur une surface au sol de 23 000 m2, une salle symphonique de 2 400 places, six salles de répétition, des espaces éducatifs, un espace de 1 000 m2 consacré aux expositions temporaires, dix studios de travail, une bibliothèque de partitions ainsi qu’un café et un restaurant. Le toit-terrasse situé à 37 mètres de hauteur sera accessible aux promeneurs. Ce toit, avec le « Grand écran » horizontal qui le surplombe, s’étire vers une banlieue délimitée par la frontière symbolique du périphérique, créant une « main tendue vers l’extérieur de Paris » et vers des « publics nouveaux » selon les propos de Laurent Bayle.
La grande salle symphonique a bénéficié des meilleurs acousticiens mondiaux avec le Néo-Zélandais Sir Harold Marshall et le Japonais Yasuhisa Toyota. Ainsi, la Philharmonie sera la première salle de concert en France à pouvoir rivaliser avec les plus grandes salles mondiales. « Paris n'était pas au niveau des autres capitales, de Londres à Berlin en passant par l'Europe du Sud, Rome, Porto, les Etats-Unis et l'Asie et les pays du Golfe », souligne Laurent Bayle.
Le directeur a également insisté sur sa volonté de ne pas ouvrir seulement « une salle de concert » mais avant tout « un lieu de vie » qu’il surnomme volontiers « Le Centre Pompidou de la musique ». Sa localisation, proche du département de Seine-Saint-Denis, doit l’ouvrir au public de banlieue et aux « quartiers en difficultés ». Sa programmation est d’ailleurs pour cela plurielle, et loin de se restreindre à la musique classique, elle offre un large éventail de styles musicaux plus populaires comme le jazz, la world music, la chanson française avec par exemple Jacques Higelin, la musique de film.
L’exploitation démarre avec d’importantes restrictions budgétaires : la subvention publique a été ramenée à 15 millions d'euros au lieu de 18 millions sur un budget total de 30 millions pour l’année 2015 au lieu de 36 initialement prévus. En cause, la Ville de Paris qui n’a choisi de verser que six millions contre les neuf millions envisagés.
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La Philharmonie de Paris est inaugurée sans Jean Nouvel
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Abonnez-vous dès 1 €Philharmonie de Paris : 1ère répétition de l'Orchestre de Paris - 12 janvier 2015 - Grande salle - Courtesy Philharmonie de Paris © photo Beaucardet