Éric Baudelaire, photographe et chantre des États fictifs

Éric Baudelaire est poète à sa façon. Il photographie des États qui n’existent plus… officiellement. Telle l’Abkhazie, ex-république soviétique. En natif du grand Ouest, Baudelaire a exploré le grand Est, après une discussion avec un ami au nom digne du 7e art : Dov Lynch. C’est lui qui lui a soufflé cette question : « Que veut dire le mot État ? »

Ne cherchez pas le reporter vadrouilleur en Baudelaire même s’il se rend souvent en Abkhazie depuis 2000. Regardez plutôt l’érudit de la photo, disciple de Jeff Wall, qui utilise un lourd appareil à pied et compose longuement ses « tableaux ». Regardez aussi Kafka dans Baudelaire. Celui-ci vous montre sur ses clichés des détails invisibles, une colline déserte où jadis se dressait « Le château », cette bobine de film rouillée que vous n’aviez pas vue dans les ruines et qu’il a placée là, ce marin qui tient une marine dans la main, au cœur d’un champ de boue.

Nous sommes en Abkhazie mais cela pourrait être un État littéraire, fictif, imaginé. « États imaginés », c’est là le titre du livre de Baudelaire, lauréat du prix HSBC 2005. Baudelaire a-t-il un lien avec le démiurge des Fleurs du Mal ? « On a des ascendants en commun, mais je ne suis pas doué pour écrire. C’est même pour ça que je me suis lancé dans la photo. »