Installée à Paris depuis 1961, Barbara Chase-Riboud est surtout connue dans l’Hexagone pour sa production littéraire.
Elle est en effet l’autrice de recueils de poésie, mais aussi de romans qui sont devenus de véritables best-sellers et qui l’ont conduite sur les plateaux de télévision, dans des émissions fameuses comme Apostrophes. Peut-être en partie occultée par ce succès et à cause d’une certaine réticence du milieu de l’art à prendre au sérieux une trop grande polyvalence, son œuvre plastique est quant à elle restée dans l’ombre. Il serait pourtant faux, comme le suggèrent certains, de voir dans cette pratique un simple passe-temps auquel Barbara Chase-Riboud s’adonnerait épisodiquement. Lorsqu’elle élit domicile en France dans les années 1960, cette femme noire américaine a d’ailleurs déjà commencé son œuvre plastique, en parallèle d’une vie un brin romanesque.
Née en 1939 à Philadelphie, elle étudie à l’université de Temple et à l’Université de Yale. Alors qu’elle n’a que 16 ans, le MoMA de New York lui achète sa première œuvre. Puis, direction l’Italie ! À 18 ans, cette jeune fille au caractère bien trempé s’envole poursuivre ses études à Rome. Un voyage en Égypte où elle découvre l’art non occidental la marque profondément. Elle épouse un lord anglais avant de le quitter une semaine plus tard et de rencontrer le photographe Marc Riboud avec lequel elle s’installe durablement dans la Ville Lumière. L’Europe compte alors peu d’artistes femmes noires. L’artiste d’origine caraïbe Hessie, dont le travail a été récemment redécouvert, vit en France à la même époque, mais les deux femmes ne se fréquentent pas vraiment, chacune appartenant à des milieux sociaux différents.
Dès 1958, Barbara Chase-Riboud réalise ses premières sculptures en bronze à tendance figurative, que l’on serait tenté de qualifier de post-Giacometti et qui échappent au mainstream de l’époque. Le choix du bronze et le recours à la cire perdue l’inscrivent dans une certaine tradition. Elle produit en outre des formes abstraites tourmentées qu’elle associe à tout un travail textile à l’aide de cordages et de tressages de laine et de soie, créant d’étranges effets de contraste avec le bronze. Cette production qui se poursuit aujourd’hui n’a pas vraiment le vent en poupe dans les années dominées par l’art minimal et l’art conceptuel. Suzanne Pagé l’invite à l’ARC en 1974, mais c’est un des rares coups de projecteur dont elle bénéficie.
Difficile gageure donc que celle de Guillaume Désanges qui a décidé de la remettre en lumière sous la Verrière Hermès à Bruxelles. Car si l’artiste dans sa version plasticienne est très connue aux États-Unis et y bénéficie actuellement d’un regain d’intérêt avec notamment une exposition récente à Philadelphie et une présence dans le nouvel accrochage du MoMA de New York depuis décembre 2019, l’Europe continue à la bouder. « Alors que nous sommes entrés dans une phase de redécouverte de certains artistes, notamment de femmes artistes, et alors que les enjeux politiques sont au cœur des pratiques contemporaines, peut-être sommes-nous prêts à réévaluer cette œuvre », souligne le commissaire Guillaume Désanges. En effet, derrière l’expressionnisme et une certaine emphase de la matière des sculptures de Chase-Riboud se cache un engagement politique fort envers la communauté noire, en totale résonance avec les débats actuels comme ceux générés par le mouvement Black Lives Matter.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Barbara Chase-Riboud
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°738 du 1 novembre 2020, avec le titre suivant : Barbara Chase-Riboud