Prix

Annulation du prix Meurice après les décisions du propriétaire de l’hôtel, le Sultan de Brunei

Par Antonin Gratien · lejournaldesarts.fr

Le 16 avril 2019 - 426 mots

PARIS

Le palace parisien a annoncé la suspension de son prix après la polémique liée à la nouvelle législation rigoriste du Sultan.

L'hôtel Le Meurice, propriété du Sultan de Brunei
L'hôtel Le Meurice, propriété du Sultan de Brunei
Photo Shoichi Iwashita, 2016

C’est avec « grand regret » que Franka Holtmann, directrice de l’hôtel Le Meurice, a annoncé samedi 13 avril l’annulation du prix d’art contemporain du palace parisien alors que la date limite des candidatures était fixée à ce vendredi 19 avril. Cette décision est liée aux récentes décisions du Sultan du Bruneï Hassanal Bolkiah, propriétaire de l’hôtel depuis 1997.

Mercredi 3 avril, le monarque de ce petit État d’Asie du sud-est a en effet instauré la peine de mort contre les homosexuels et les personnes coupables d’adultère. Une mesure largement critiquée par la presse occidentale, et dont les polémiques ont provoqué l’annulation du Prix Meurice. Au moins pour sa douzième édition.

Directement inspirée d’une lecture traditionnaliste de la charia, une nouvelle législation du Bruneï a été mise en place en 2014. Dernier volet d’une série de révisions du Code pénal, le texte du 3 avril prévoit l’amputation des voleurs, la lapidation des homosexuels, des personnes coupables d’adultère, et des blasphémateurs. Des sanctions jugées « cruelles et inhumaines » par Michelle Bachelet, la haute commissaire aux droits de l’homme de l’ONU. Prévue pour le début du mois, l’entrée en vigueur de ces réformes n’a cependant pas été officialisée.

Le monde de l’art, voyait jusqu’ici le 27è sultan du Bruneï comme un mécène :  la Brunei Gallery en Angleterre, le Prix Meurice en France. Depuis 2008, le prix récompense annuellement un jeune artiste et la galerie qui le représente. Malgré l’annonce, en 2013, du tournant rigoriste de son propriétaire, l’organisation du prix avait pourtant suivi son cours. Une inertie que les artistes Virgile Fraisse et Georgia René-Worns ont qualifiée « d’inconcevable » dans une lettre ouverte où ils relèvent une incompatibilité entre la défense d’un « programme progressiste », et le financement du prix par « l’argent d’un Etat répressif ».

Mercredi 10 avril, les deux artistes ont invité par e-mail 31 galeries et 17 artistes à commenter la situation tout en demandant l’application de l’article 10 du Prix Meurice qui stipule : « Le Meurice se réserve le droit de proroger, d’écourter ou d’annuler le présent Prix […] si les circonstances l’exigent »

Claire Moulène, conseillère artistique du prix en a été informée. La journaliste et commissaire avait alors indiqué à ses deux interlocuteurs qu’une discussion était déjà engagée à ce sujet entre elle, les onze membres du jury, et la direction de l’hôtel. Trois jours plus tard, Franka Holtmann annonçait la suspension du concours.
 

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