L’École nationale supérieure d’architecture de la ville et des territoires de Marne-la-Vallée dispense une formation innovante dans le cadre des transitions énergétiques et climatiques.
MARNE-LA-VALLÉE - Il y a urgence. Face à la planète menacée dans ses équilibres par le réchauffement climatique en raison de l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre, notamment de CO2 (dioxyde de carbone), les jeunes générations doivent s’armer pour répondre aux défis des grandes transitions énergétiques, écologiques, démographiques, urbaines, économiques (1). Pour leur part, l’architecte et l’urbaniste ont un rôle majeur à jouer, car ils touchent aux modes de vie, au transport et à l’habitat. Selon le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), la construction, la maintenance et la transformation des bâtiments sont responsables de 40 % de l’énergie consommée et de 19 % des émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial. Alors que les écoles d’architecture se mettent à l’heure de cette urgence, un Diplôme d’études approfondies architecture post-carbone créé en 2012 par l’ENSAVT (École nationale supérieure d’architecture de la ville et des territoires) de Marne- la-Vallée et l’École des Ponts ParisTech trouve tout son sens : faire la chasse au carbone et aux déperditions énergétiques, intensifier le recours aux énergies renouvelables, adapter strictement les projets à leur environnement, penser climat, matériaux et savoir-faire locaux. Les diplômés de la première promotion se sont tous rapidement insérés professionnellement et la moitié d’entre eux travaille à l’étranger.
« L’architecte dispose de leviers très importants pour faire évoluer les bâtiments vers des formes plus sobres, plus durables », souligne Emma Carvalho de Oliveira, 29 ans, aujourd’hui recrutée au sein du bureau d’études Elioth. « Les trois axes de la formation – matière, structure, énergie – et les croisements qui s’y opèrent, sont essentiels. L’architecte est le grand ordonnateur du travail de conception et ne doit pas être relégué à la “déco” de façade. Il doit disposer des outils pour dialoguer, contredire, soutenir sa vision avec un socle solide de connaissances scientifiques. Et être capable de les sublimer. » Alice Barrois, 26 ans, estime que « le DPEA [Diplôme propre aux écoles d’architecture] est une vraie rampe de lancement. On applique de façon très concrète les exigences du développement durable au projet architectural. » Lors de son stage professionnel chez Grimshaw à Londres, elle a collaboré aux projets de construction d’une centrale électrique biomasse en milieu urbain et d’un luminaire autosuffisant. Aujourd’hui à Melbourne, elle travaille pour la même agence sur un projet de développement urbain dans un milieu naturel protégé, la Yarra Valley.
Des architectes ingénieurs
Cette formation post-master de dix-huit mois, accessible aux architectes diplômés et pour laquelle « carbone » s’entend comme le marqueur de l’empreinte environnementale des constructions, propose des enseignements autour de la thermodynamique, du calcul des matériaux, de l’énergétique des bâtiments, de la mécanique des structures, de l’architecture bioclimatique, et également des travaux pratiques, des études répondant à des commandes extérieures, ainsi que de nombreux séminaires et espaces de réflexion critique. Il ne s’agit pas de transformer des architectes en ingénieurs, mais de leur permettre « d’appréhender l’architecture à travers le prisme de l’énergie, des ressources en général et de la frugalité », insiste Jean-François Blassel, architecte et ingénieur centralien, directeur du DPEA. Un exercice sur un habitat de 20 m² susceptible d’être implanté en Alaska, en Autriche ou au Maroc a donné lieu à des recherches sur l’histoire et la géographie, le climat et les ressources naturelles de chacun des sites, sur les modes de vie, les besoins thermiques et en eau des futurs habitants, pour aboutir à une stratégie argumentée du projet architectural.
Pour Constant Janner, 26 ans, le DPEA a été déterminant pour redonner du « sens à son métier d’architecte ». Après un séjour en Inde, puis au Népal, le voici au Tadjikistan, employé par GERES (Groupe Énergies renouvelables, Environnement et Solidarité), une ONG française, pour un projet de maison à basse consommation énergétique dans un contexte de grande pauvreté. Sa méthode ? Comprendre les usages et les besoins des populations, travailler avec tous les acteurs de la construction, les artisans, les commerçants, prendre en compte au maximum le contexte et relier l’architecture aux enjeux environnementaux et socio-économiques. « Il est grand temps de s’y mettre ! » Urgence, disions-nous.
(1) Voir Ré-enchanter le monde, L’architecture et la ville face aux grandes transitions, Cité de l’architecture et du patrimoine- Éditions Gallimard, 2014, sous la direction de Marie-Hélène Contal.
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Construire dans une société post-carbone
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Abonnez-vous dès 1 €École d’architecture de la ville et des territoires à la Cité Descartes à Champs-sur-Marne-Val Maubuée, architecte : Bernard Tschumi. © Photo : Éric Morency/Iconothèque Epamarne-Epafrance.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°448 du 8 janvier 2016, avec le titre suivant : Construire dans une société post-carbone