Le nombre de vols commis en 1999 sur le territoire français est nettement inférieur à celui de l’année précédente. Les conseils et les initiatives des professionnels de la prévention, assureurs, courtiers, policiers et gendarmes, porteraient-ils déjà leurs fruits ?
Si chacun connaît quelques mesures élémentaires qui relèvent du simple bon sens (répartir les objets de valeur dans diverses pièces, éviter de les regrouper au rez-de-chaussée et de les exposer lors des journées du Patrimoine, par exemple), ce sont les spécialistes de la prévention, assureurs et courtiers, qui, lors des visites préalables à la signature d’un contrat, donnent à leurs assurés les conseils les plus adaptés à leur situation.
Une bonne protection mécanique est dans tous les cas indispensable : blindage, pose de protège-gonds, cornières antipinces et serrures multipoints agréées A2P (Assurance, Protection, Prévention) pour les portes, système de blocage (vis ou barre) ou de verrouillage sur les volets et les persiennes, ainsi que des barreaux avec un écartement maximum de 12 cm sur les lucarnes, vasistas et soupiraux, assurent déjà une bonne protection, qui peut être complétée, si l’ampleur du patrimoine le nécessite, par une protection électronique. Alarmes sonores ou lumineuses, télésurveillance, asservissement des éclairages extérieurs aux systèmes d’alarme, éclairage automatique des abords du bâtiment sont autant de solutions dissuasives. «Placer une alarme dans le parc est un choix très efficace : son déclenchement, qui se fait plus tôt que si elle avait été placée à l’intérieur de la demeure, peut effrayer le voleur et l’inciter à renoncer à son vol», conseille Diana des Moutis, responsable de Gras Savoye Patrimoine. “Par ailleurs, il vaut mieux faire appel à un installateur agréé APSAD (Assemblée plénière des sociétés d’assurances dommages) pour la mise en place et la maintenance d’un système de protection contre le vol et l’incendie qu’à un serrurier ordinaire. Le coût est le même pour le propriétaire, et son intallation est reconnue par son assureur.”
Le vol est plus désastreux
Si le vol est très spectaculaire, l’incendie, lui, est beaucoup plus redoutable car souvent désastreux. «Récemment un téléviseur a implosé chez l’un de nos assurés. L’incendie a duré une heure et a complètement ravagé l’appartement. Il y a eu pour 53 millions de francs de dégâts», confirme Diana des Moutis. Initiative originale, Independent Insurance a récemment décidé de sensibiliser ses clients à la prévention de l’incendie en leur distribuant gratuitement extincteurs à poudre et détecteurs optiques de fumée et de feu. «Les incendies représentent 90 % des sinistres et sont les plus coûteux. Nous préférons investir dans la prévention du risque auprès de nos clients que de payer des sinistres. Nos ingénieurs prévention, qui visitent chaque demeure à assurer, procèdent à des analyses de vulnérabilité et conseillent ainsi les mesures préventives adaptées à chaque situation. La prévention est notre cheval de bataille : notre volonté est d’agir en amont du sinistre» , explique Patrick Serror, directeur des services techniques d’Independent Insurance.
Pour assurer le plus rapidement possible tableaux, bijoux et objets d’art, Siaci, courtier, propose à ses assurés un nouveau service : «Nous lançons le site artassur.fr qui permettra, dès le 1er juin prochain, aux collectionneurs et aux professionnels d’effectuer des devis en ligne à tout moment de la journée et de la semaine. C’est un service très souple, rapide, personnalisé et, bien sûr, confidentiel qui permettra de connaître sans engagement le coût d’un contrat», expose Judith Goldnadel, responsable de la communication chez Siaci.
Police et gendarmerie : des conseils et des services préventifs
Face aux 6 000 vols enregistrés en moyenne chaque année, policiers et gendarmes ont développé, parallèlement à leurs activités répressives, des actions préventives. De nombreuses conférences et réunions informatives auprès d’associations de propriétaires de belles demeures sont ainsi régulièrement organisées : elles sont l’occasion de rappeler quelques conseils utiles aux détenteurs d’un patrimoine privé souvent démunis face à une criminalité organisée. «Nous recommandons d’établir une fiche descriptive illustrée d’une photographie pour chaque objet d’art. J’insiste bien sur le fait qu’il est nécessaire pour nous d’avoir de bonnes photos, prises pour cet usage, non pas des photos de famille où l’on remarque, dans le fond, l’objet d’art qui nous intéresse. L’idéal est une photo numérique, c’est-à-dire une photo de bonne qualité, que nous pouvons adresser simultanément à nos 3 500 brigades réparties sur le territoire français», précise le lieutenant-colonel Alex Wujkow, directeur du bureau animation et coordination de la Gendarmerie nationale. «Nous incitons également les propriétaires qui s’absentent quelque temps de leur demeure à nous le signaler. Il suffit pour cela de s’adresser au commandant de la compagnie départementale de la Gendarmerie : les PSIG (Pelotons de surveillance et d’intervention de la gendarmerie), composés de deux ou trois équipes de gendarmes reliées entre elles, patrouillent dans les campagnes la nuit et surveillent plus particulièrement ces demeures.»
À ces conseils et services s’ajoute la mise en place d’un dispositif récent. «Créée en janvier dernier, la cellule interministérielle de liaison sur la délinquance itinérante, située à Rosny-sous-Bois, a pour mission de s’intéresser tout particulièrement aux bandes organisées : elles commettent différents types de délits (vols dans des demeures de caractère, vols dans des magasins, casses de distributeurs automatiques...) mais limités à un territoire et effectués selon des méthodes identiques. Nos analyses criminelles, plus rapides et plus efficaces dans le cadre de cette cellule, nous permettent de relier faits et individus et d’établir des connexions entre toutes ces formes de délinquance», précise le lieutenant-colonel Alex Wujkow.
«La France est, avec l’Italie, le pays le plus touché par les vols d’oeuvres d’art. Patrimoines privé et public souffrent en moyenne de 6 000 vols par an. Et si l’on estime que sept à dix objets sont raflés lors de chaque vol, on réalise que ce sont presque 60 000 objets qui disparaissent chaque année. On en retrouve un sur dix, mais la plupart quittent la France pour la Belgique ou les Pays-Bas dans un premier temps, pour les États-Unis et le Japon ensuite. En 1998, les vols ont considérablement augmenté avec la relance du marché de l’art, et cette demande s’est répercutée automatiquement sur le marché illicite de l’art : les vols, qui répondent à une demande sur le marché, sont soumis à la mode. À la fin des années soixante-dix et au début des années quatre-vingt, c’était les icônes qui provenaient d’URSS. Aujourd’hui, c’est le XVIIIe siècle qui a le plus de succès. Mobilier, objets d’art, peinture..., tout intéresse les voleurs», explique le commissaire principal Jean-François Lelièvre, de l’Office central de lutte contre le trafic des biens culturels (OCBC). En 1999, le nombre de vols commis en France a diminué, pour revenir à la moyenne de 6 000 par an. «Les efforts conjugués de la police et de la gendarmerie, unies d’une même voix, sont très fructueux. Nous avons plusieurs affaires en cours et nous attendons de bons résultats prochainement», précise le lieutenant-colonel Alex Wujkow.
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Vols et incendies : prévenir plutôt que guérir
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°106 du 26 mai 2000, avec le titre suivant : Vols et incendies : prévenir plutôt que guérir