De nombreux événements profitent de Tefaf pour se faire connaître. Le Detroit Institute of Arts y expose des œuvres issues de ses collections. Les mélomanes apprécieront le concert du jubilé.
Les visiteurs de la plus grande foire d’art et d’antiquités en Europe auraient-ils besoin de se divertir ? Cette édition 2005 de Tefaf (International Fine Art and Antiques Fair) est marquée par plusieurs manifestations singulières qui, a priori, n’ont rien à voir avec le marché de l’art : exposition spéciale, concert de musique classique et lancement d’un catalogue raisonné… Ces événements découlent-ils de la notoriété de la foire ou sont-ils programmés pour consolider son prestige ? Si la naissance d’enfants turbulents comme Frieze Art Fair ou les fastes de la Biennale des antiquaires de Paris ne menacent en rien la toute-puissance de la foire hollandaise, ne ressent-elle pas ici le besoin de se diversifier pour entretenir sa clientèle ?
Retour aux sources
Inspiré par l’exposition « Trésors du Musée de l’Ermitage de Saint-Pétersbourg » qui s’est tenue lors de l’édition 1994 de Tefaf, George Keyes, conservateur en chef au Detroit Institute of Arts (DIA), a pris l’initiative de contacter le conseil d’administration de la foire. Le musée américain étant en travaux, il était en mesure de prêter parmi les plus belles pièces de ses collections. Avec la bénédiction du comité exécutif de Tefaf, George Keyes a opéré sa sélection avec pour « critère décisif » le fait pour les œuvres d’avoir été présentées lors d’une précédente édition du salon. Ainsi Le Paysage éclairé par la Lune avec un moulin à vent, d’Aert van der Neer, proposé par la galerie Sanct Lucas (Vienne), a été acquis par la National Gallery de Washington en 1990 avant d’entrer dans les collections du DIA en 2001. Les Fleurs dans un vase en verre, de Rachel Ruysch, ont été achetées par l’intermédiaire de Johnny Van Haeften (Londres), lui-même vendeur du curieux Paysans faisant ribote dans un intérieur rustique, d’Adriaen van Ostade. Au total, 25 tableaux et 10 sculptures européens du XVIe au XVIIIe siècle sont exposés, dont la plus grande partie a été acquise à Tefaf. « Notre collection est prestigieuse mais méconnue. Tefaf nous apportera une publicité sans pareille à un moment idéal », se félicite George Keyes. L’arrangement financier consiste en la prise en charge du transport et de l’assurance par Tefaf. « Il s’agit d’une merveilleuse opération de relations publiques tant pour le DIA que pour Tefaf », renchérit la responsable de la communication de la foire, Titia Vellenga, pour qui l’attrait d’une telle exposition aux yeux des institutions internationales est indéniable. La grande qualité des œuvres acquises via Tefaf saura peut-être inspirer un passage à l’acte. Et Titia Vellenga de rappeler que l’exposition de l’Ermitage en 1994 émanait d’une volonté de promouvoir la foire sur le plan international ; aujourd’hui qu’elle a atteint son maximum de capacité en termes de visiteurs, « nous hésitons avant d’organiser des événements parallèles », avoue-t-elle.
Vitrine de luxe
Et pourtant... Si l’inauguration officielle et la « cocktail hour » sont régulièrement bercées par quelque quartet depuis 1989, un septuor donnera le 7 mars un concert exceptionnel pour le 500e anniversaire de la naissance d’Andrea Amati, professeur d’Antonius Stradivarius. Le Palazzo Communale de Crémone (Italie) a d’ailleurs consenti au prêt de trois violons Amati, qui seront exposés pendant la durée de la foire. Cette aventure lyrique relève de l’initiative de Gil Sharon, directeur artistique de l’Ensemble Amati de Maastricht, qui profite de ce jubilé et de la venue massive de visiteurs internationaux pour faire connaître son travail. Bénéficiant d’une médiatisation sans égale, ce récital ne recevra aucune compensation financière. Parallèlement, deux soirées de gala sont prévues au Théâtre Vrijthof à Maastricht : dix-huit musiciens internationaux joueront sur des violons Amati datant des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, dont le plus ancien, datant de 1566, Il Carlo IX di Francia, reviendra à Gil Sharon en personne. Les exposants ont bénéficié d’un accès prioritaire aux billets : gageons que de nombreux collectionneurs se verront offrir des places par des marchands bienveillants...
Quelle meilleure vitrine en effet que la foire de Maastricht ? C’est ainsi que le libraire londonien Sir Thomas Heneage a convaincu John Benjamins Publishing Co. d’y organiser cette année le lancement du catalogue raisonné du peintre hollandais Karel du Jardin (1626-1678). La publication se devait d’être célébrée avec tous les honneurs, même si Kees Vaes, directeur de publication chez John Benjamins, qualifie l’opération d’« académique » : l’auteure, Jennifer Kilian, donnera une conférence avant une séance de dédicaces sur le stand de Thomas Heneage Art Books. Pour Titia Vellenga, ce lancement relève de « l’événement marketing-relations publiques ». Pourquoi donc l’avoir approuvé ? « Parce que le sujet du livre est en rapport direct avec la foire ; et l’éditeur a loué l’un de nos salons, nous n’avons pas mis d’espace gratuitement à sa disposition comme pour le DIA ou l’Ensemble Amati ».
À événement exceptionnel, cadre exceptionnel. Certains profitent du prestige de la foire, et le comité d’organisation, en misant sur la qualité, offre au visiteur un supplément de réjouissances.
- EXPOSITION DU DETROIT INSTITUTE OF ARTS, dans le cadre de la foire, aux jours et heures d’ouverture. - CONCERT DU JUBILE, Theater aan het Vrijthof, Maastricht, dimanche 6 mars (complet) et lundi 7 mars, 20 heures. Réservations, tél. 31 43 350 5555, 50 euros. Rens. : www.amati500.nl. - JENNIFER KILIAN, KAREL DU JARDIN (1626-1678), John Benjamins Publishing Company, Amsterdam, 2005, 498 p., 229 ill. n&b et 32 ill. couleur, ISBN 90-272-5338-2, 340 euros.
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°209 du 18 février 2005, avec le titre suivant : Visiter, écouter, lire... à Maastricht