Le ministère de la Culture a présenté une proposition de loi permettant de faciliter la restitution de biens volés entre 1933 et 1945, intégrés aux collections nationales françaises.
France. C’était il y a un peu plus d’un an : une loi qualifiée alors d’historique permettait le retour de quinze œuvres d’art conservées dans les collections nationales aux ayants droit de leurs propriétaires originels, des Juifs spoliés de leurs biens durant la période nazie (1933-1945). Le texte avait alors été approuvé par l’Assemblée nationale puis le Sénat, obtenant pour la première fois le déclassement de ces quinze œuvres, dont Rosiers sous les arbres, une toile de Gustav Klimt (1905) conservée au Musée d’Orsay. Ce processus législatif pourrait être bientôt simplifié, grâce à une loi-cadre présentée au Conseil des ministres le 19 avril dernier par la ministre de la Culture.
Contrairement aux objets du MNR (Musées nationaux récupération) qui peuvent être rendus sur simple décision administrative, les œuvres restituées en février 2022 étaient intégrées aux collections nationales, et donc inaliénables. Pour ces biens, une loi d’espèce est nécessaire à chaque nouveau dossier afin de déroger au principe d’inaliénabilité. Le projet présenté par la ministre de la Culture, Rima Abdul Malak, répond au besoin d’une loi-cadre qui automatise ce processus législatif, fonctionnant pour l’heure au cas par cas.
Le texte « va permettre de faciliter le processus de restitution des œuvres spoliées relevant du domaine public de l’État et des collectivités territoriales, précise le communiqué publié par le ministère de la Culture. Il crée dans le code du patrimoine une dérogation au principe d’inaliénabilité limitée aux différentes formes de spoliations liées à des persécutions antisémites perpétrées pendant la période nazie. » La sortie des collections d’un bien dont les propriétaires légitimes ont été identifiés sera décidée sur avis d’une commission administrative ad hoc, dont la constitution est « naturellement » confiée à la Commission pour l’indemnisation des victimes de spoliation (CIVS). Créée en 1999, la CIVS est rattachée à Matignon et a pour mission de répondre aux demandes des victimes ou de leurs familles. Un décret de 2018 lui donne également l’initiative de proposer des restitutions, secondée dans ce travail par la Mission de recherche et de restitution des biens culturels spoliés entre 1933 et 1945 (M2RS), rattachée au ministère de la Culture, et qui identifie les propriétaires légitimes de biens MNR, mais aussi d’œuvres des collections de France.
Le texte du gouvernement a été approuvé par le Conseil d’État, relevant qu’il permet à la personne publique de prendre l’initiative de la restitution, et que « le processus de restitution des œuvres spoliées intégrées aux collections publiques sera ainsi amplifié, en permettant la restitution dans des circonstances de temps, de lieu, de droit ou de fait des actes de spoliations élargies par rapport aux régimes antérieurs de restitution ». Le passage du texte en séance publique au Sénat est programmé le 23 mai prochain.
Cette loi-cadre sera la première d’une série de trois, traitant thématiquement les différents types de restitution. Suivront ainsi un texte sur la restitution des restes humains, et un autre sur les biens issus du contexte colonial français [lire page 3]. Le nombre d’objets de toutes sortes (tableaux, livres, archives…) volés par les nazis à des Juifs, présents dans les collections françaises, est estimé autour de 100 000 – un nombre « sans doute sous-estimé » selon David Zivie, chef de la M2RS.
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Une loi-cadre pour la restitution des biens volés par les nazis
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°610 du 28 avril 2023, avec le titre suivant : Une loi-cadre pour la restitution des biens volés par les nazis