Au-delà de la culture, ces expositions sont un outil dans les relations internationales.
Politique culturelle. Indéniablement les expositions internationales jouent un rôle crucial dans la diplomatie culturelle. Elles sont d’ailleurs encouragées par la Rue de Valois et le Quai d’Orsay qui les considèrent comme un instrument au service du prestige de la France. « De fait le personnel et les collections nationales sont un peu instrumentalisés, déplore un conservateur. Nous n’avons par exemple qu’une faible latitude dans le choix des destinations. Nous allons majoritairement là où la France a des intérêts politiques ou économiques, ou dans des pays où elle souhaite en développer. Ce n’est pas un hasard s’il y une telle concentration de projets en Asie, aux États-Unis et en Amérique latine. » Démonstration éclatante de la mission de soft power octroyée à ces coopérations, le président de la République a justement choisi son voyage officiel en Chine, au cours duquel ont été conclus d’importants contrats, pour officialiser la création d’un Centre Pompidou à Shanghaï. Autre exemple : l’exposition que le Musée d’Orsay présente ce printemps à l’Art Gallery of South Australia d’Adelaïde, la première organisée par l’établissement dans cette ville, est étroitement liée à la signature d’un contrat mirifique entre les deux pays pour la fabrication de sous-marins. Ouvertement affichée comme un gage d’amitié et de confiance avec les interlocuteurs de la France, cette politique a aussi pour but de conserver, voire de prendre, l’ascendant culturel à l’heure où la rivalité entre grandes institutions internationales fait rage. Alors qu’une quantité phénoménale de musées ont ouvert leurs portes en quelques années, essentiellement en Asie, ces sites qui s’apparentent parfois à des coquilles vides, sollicitent massivement les institutions de référence pour leur fournir des expositions clefs en mains. Inaugurée en 2015, la National Gallery of Singapour a ainsi déjà accueilli trois expositions montées par d’autres musées, notamment le Centre Pompidou et le Musée d’Orsay. L’enjeu pour les établissements est donc de se positionner sur ces nouveaux marchés avant que leurs concurrents ne le fassent et mettent en lumière leurs collections, leur marque et par conséquent leur pays. Cette compétition internationale par le biais de l’art n’est d’ailleurs pas une nouveauté. Autre temps, autres mœurs ; l’essor des expositions internationales au XXe siècle a même été dicté par la volonté de frapper les esprits à l’étranger et de diffuser des messages idéologiques. À commencer par les idéologies totalitaires. « La première exposition internationale itinérante constitue un parfait exemple de cette puissance d’influence recherchée par les États à travers ces manifestations », rappelle Rebecca Amsellem. « Cette exposition, consacrée aux trésors de l’art italien, a en effet été organisée en 1930 à Londres par Lady Chamberlain avec l’appui de Mussolini. Elle avait clairement pour objectif de véhiculer l’idéal fasciste. » Cette manifestation sera la première d’une longue liste qui culminera durant la guerre froide où les États-Unis se montreront particulièrement actifs en la matière.
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Un instrument diplomatique
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°494 du 2 février 2018, avec le titre suivant : Un instrument diplomatique