Le ministre de la Culture baisse les crédits d’acquisition des musées.
PARIS - « Je suis un éternel mendiant », a précisé d’emblée Renaud Donnedieu de Vabres le 28 septembre, lors de la présentation des grandes lignes de son projet de loi de finances 2006. Si celui-ci est modifié dans son architecture par la mise en application de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances (LOLF, lire l’encadré), il confirme toutefois les orientations traditionnelles du ministère, le spectacle vivant drainant cette année encore 36 % de l’enveloppe (contre 31 % en 2005). Concernant son volume global, le jeu des chiffres permet d’annoncer une augmentation substantielle de 4,9 %, sensiblement gonflée par la dotation en capital exceptionnelle de 100 millions d’euros provenant du compte des privatisations. Contrairement à ce qu’avait annoncé le ministre à la veille des Journées du patrimoine – grâce à un habile tour de passe-passe sémantique –, ces 100 millions ne seront pas affectés au seul patrimoine monumental mais à l’intégralité du nouveau programme « Patrimoines », qui comprend aussi l’archéologie, l’architecture, les musées, les bibliothèques, les archives… Cette somme sera attribuée à un opérateur, l’établissement public de maîtrise d’ouvrage des travaux culturels (EMOC, lire le JdA no 220, 9 septembre 2005), et servira à financer la construction d’équipements (département des Arts de l’Islam au Louvre à Paris, Centre des Archives nationales de Pierrefitte-sur-Seine, en Seine-Saint-Denis) et la restauration de monuments historiques (château de Saumur, en Maine-et-Loire, plan « Cathédrales », château de Versailles, Grand Palais à Paris…), mais aussi à solder quelques paiements en souffrance. Ce capital servira donc à payer une partie des dettes du ministère ! Mais Renaud Donnedieu de Vabres se veut rassurant, précisant que des mesures drastiques d’économie permettront de réduire de 13 % les coûts de fonctionnement du ministère : « Ce ministère est bien géré, et il est important que cela se sache. »
Dans le détail, certaines actions subissent pourtant des baisses de moyens importantes. Ainsi de la chute vertigineuse (- 26 %) des crédits destinés à l’enrichissement des collections publiques, que la mise en place d’une commission d’acquisition du FNAC lors de la Foire internationale d’art contemporain (FIAC) a probablement tenté de masquer. À l’intérieur du programme « Patrimoines », les grands chantiers en cours (Cité de l’architecture et du patrimoine et Musée du quai Branly, à Paris) continuent à vampiriser une partie importante du budget. Certains projets semblent d’ailleurs mis en veille : le Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (Mucem) de Marseille (aucun crédit pour le lancement de la construction du bâtiment) ou encore la Cité nationale de l’histoire de l’immigration (une rénovation du Palais de la porte Dorée est évoquée, mais à quelles fins ?). Seuls 3,9 millions d’euros seront par ailleurs débloqués pour la mise en sécurité du site Richelieu, prélude indispensable à l’installation de la bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art (INHA), dont le chantier total est toutefois estimé par les spécialistes à 128 millions d’euros !
Intégrés au deuxième programme « Création », les arts plastiques demeurent les parents pauvres du budget (environ 5 % de l’enveloppe). Une partie de ces 151 millions seront affectés, comme annoncé l’an passé, aux travaux de la galerie Formigé des Gobelins, destinée à la présentation des créations contemporaines des Manufactures nationales, et 1,1 million d’euros seront dévolus à des études sur les travaux d’aménagement du Palais de Tokyo. À noter, enfin, dans le troisième programme, les 400 000 euros octroyés au projet de bibliothèque numérique européenne, ardemment soutenu par le président de la République.
La mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), qui définit désormais le budget de l’État en trente-quatre grandes missions, engendre une reconfiguration de la structure budgétaire du ministère de la Culture et de la Communication, déjà mise en œuvre cette année à titre expérimental dans huit directions régionales des Affaires culturelles (DRAC). La Rue de Valois assume désormais deux missions ministérielles : « Culture » et « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale » (hors budget, car dépendant d’un compte d’affectation spécial). Une partie de son budget est aussi affecté à la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » (225,4 millions d’euros). C’est donc vers la mission « Culture » que sont injectés les principaux crédits du ministère (2,886 milliards d’euros). Celle-ci comprend trois programmes – « Patrimoines » (36 %), « Création » (33 %) et « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » (31 %) –, qui sont à leur tour déclinés en actions. Outre ce remodelage du budget, la LOLF introduit une nouveauté majeure : la culture du résultat. Des projets annuels de performance, définis pour chaque mission, accompagnent le budget et seront examinés par le Parlement à la fin de chaque exercice.
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Un budget mou
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°222 du 7 octobre 2005, avec le titre suivant : Un budget mou