Pierrick Sorin - Le perdant magnifique

À la caméra : son propre père. Voix douce et étonnée devant l’hypothèse sidérée d’une lecture psy. L’intéressé balaie d’un revers de manche lunaire. « C’était l’occasion de filmer la mer. » Juste un « premier vrai film scénarisé » remis en circulation dans une sorte de « fond de tiroir » pour sa rétrospective au Lieu Unique. Et pour cause. Y pointe déjà la signature des saynètes filmiques et petits théâtres optiques qui le propulseront sur le devant de la scène internationale dans les années 1990 : l’autofilmage en antihéros, le goût du burlesque et la poétique de la tentative.

Une première et courte vie d’instituteur encourage ce fou de Mallarmé à se faire artiste, après une adolescence nantaise passée dans un lycée de garçons où l’« on pouvait devenir écrivain, mais pas artiste ». Succès, hypersuccès, coup de frein relatif. C’est la scène qui le ramène, lui et ses bidouillages d’images mi-music-hall, mi-Méliès. Du côté de Rossini d’abord, pour une co-mise en scène de La Pietra del Paragone en 2007 puis aux commandes de 22 h 13 au Théâtre du Rond-Point, pour une traversée fantasque du miroir. « Entre performance visuelle et théâtre », il y débroussaille 24 heures de la vie d’un vidéaste dans son atelier. Ou comment dézinguer en poésie la posture de l’artiste.