Ce début de printemps est particulièrement maussade pour le ministère de la Culture qui subit de fortes pressions de la part de son personnel. Depuis la fin du mois de mars, de nombreux musées et monuments historiques sont en effet touchés par des grèves à répétition. Au centre de la contestation : les discussions sur la mise en place des 35 heures.
PARIS - Les négociations relatives à la réduction du temps de travail (RTT) ont servi de détonateur et révélé de profonds dysfonctionnements au sein du ministère de la Culture. Derrière le réaménagement de la durée du temps de travail, c’est la question de la précarité de l’emploi et le problème des sous-effectifs qui réapparaissent en filigrane. Les exemples abondent. Ainsi, à Versailles, sur les 140 postes réclamés par l’établissement public, seuls quatre ont finalement été créés, contraignant les responsables à sous-traiter en partie l’entretien des jardins. Au Louvre, des difficultés similaires se font jour : la disparition progressive des emplois de vacataires non assortie de création de postes, la hausse constante de la fréquentation et l’accroissement des surfaces d’exposition entraînent des problèmes de gardiennage et la fermeture d’environ 22 % des salles par rotation. Les syndicats dénoncent cette privatisation masquée et l’absence patente de cohérence entre les discours et les faits. Ces dossiers épineux, longtemps occultés, sont ainsi remis brutalement à l’ordre du jour sans qu’une quelconque réflexion ait été engagée au préalable. Exigeant des assurances sur l’application des 35 heures, les syndicats réitèrent leurs demandes : des créations de postes stables pour résorber le sous-effectif et la conservation de leurs acquis sociaux, notamment la sixième semaine de congés, dite “semaine Malraux” qui compense la pénibilité de certains postes. Suspendus temporairement pendant le week-end de Pâques, les mouvements sociaux ont repris leur souffle avant l’offensive déterminante du 26 avril, date à laquelle l’intersyndicale devait à nouveau rencontrer les responsables du ministère. Aucun accord n’ayant pu être trouvé jusqu’à présent, l’ensemble des organisations syndicales (hormis FO) appellent en effet à une grève générale impliquant les différents secteurs de la culture (musées, monuments historiques, écoles d’art...). Les revendications des personnels se heurtent pour le moment à une fin de non-recevoir : le ministère se déclare dans “l’impossibilité de se prononcer sur le nombre de créations d’emplois dans la loi de finances 2002 avant que Matignon ne donne son arbitrage, début juillet”. Selon Laurent Rabaté, directeur adjoint chargé des affaires budgétaires et sociales au ministère de la Culture, un accord de cette importance ne se négocie pas dans la hâte : “Le ministère souhaite engager au préalable des discussions sur le calendrier à établir. Nous sommes seulement dans une phase préparatoire.”
“Quant aux revendications de syndicats sur les créations de postes : ce n’est pas envisageable dans le cadre des RTT, mais plus sûrement dans une optique plus large de redéploiement des emplois”, poursuit Laurent Rabaté. Le mouvement pourrait donc bien faire tache d’huile, et déclencher d’autres vagues de protestations.
Les enseignants des écoles d’art ont de leur côté un sérieux contentieux à régler avec leur organisme de tutelle : ils réclament depuis plusieurs années une revalorisation de leur statut, et la fin des disparités entre les différents établissements. Menée principalement par les écoles nationales, l’action rencontre également un écho favorable dans les écoles d’art territoriales qui, à la différence des premières, ne dépendent pas directement du ministère de la Culture, mais ont pour principal interlocuteur les élus locaux. “Qu’elles soient nationales ou territoriales, les écoles d’art rencontrent les mêmes difficultés, et élaborent des propositions communes. Les maires sont en général attentifs et à l’écoute de nos revendications, ils sont plutôt nos alliés dans ce mouvement, mais ne sont pas toujours en mesure de faire face financièrement et pédagogiquement. Cela place les établissements territoriaux dans une position délicate, et met un frein à une mobilisation unitaire”, précise Hélène Mugot, présidente de la Coordination nationale des enseignants des écoles d’art. Un appel général aux boycotts des concours de recrutements a cependant déjà été lancé. Cette menace s’inscrit dans une série de mesures qui devrait fortement perturber la vie des établissements : refus de communiquer les dates de réunions des jurys, ainsi que leur composition ; refus également de faire passer les diplômes et les concours. “Nous demandons une remise à plat complète du problème des écoles d’art. Les écoles territoriales ne sont toujours pas reconnues comme des établissements d’enseignement supérieur, et les équivalences avec les diplômes étrangers demeurent problématiques. Toutes ces aberrations administratives aboutissent à des situations inacceptables”, conclut Hélène Mugot.
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Mouvements « sociaux-culturels »
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°126 du 27 avril 2001, avec le titre suivant : Mouvements « sociaux-culturels »