Maryline Desbiolles - La mesure éblouie

Là-bas, chez elle, la montagne tombe dans la mer, à moins que ce ne soit la mer qui gravisse la montagne. Chiasme infini du monde. Là-bas, chez Maryline Desbiolles, c’est aussi chez eux, chez ces artistes qui firent du tropisme azuréen un paradis perdu, un Parnasse rêvé : Matisse, Bonnard, Cézanne, Derain, Viallat, Pincemin, à qui elle a consacré un livre – Les Draps du peintre (2008) –, et Pagès, avec lequel elle a scellé sa vie. Elle dit avoir toujours aimé la peinture, au point d’avoir souvent rejoint la Fondation Maeght en stop, au point de lui avoir consacré des études universitaires, avortées non par paresse, juste par dépit – la langue n’était pas la sienne, l’exercice se refusait à elle.

Ce fut donc l’écriture, celle qui permet d’essayer de dire ce que l’on voit. Peut-être même de voir, tout court. Épiphanie. Un premier recueil de poésies, écrit à 18 ans. Un ouvrage intime – Une femme de rien (1987). Une revue décisive – La Mètis, fondée en 1990. Puis, dans l’ordre, les éditions du Seuil avec la rencontre de Denis Roche, le prix Femina pour Anchise, des livres à son corps défendant, des livres évidents, dont un, paru fin septembre – Vallotton est inadmissible. Cela, elle le dit avec une voix couleur sable, avec une joie réservée, une joie qui s’excuse d’être joie, une joie qui a la chaleur de l’été et la retenue de l’arrière-pays, entre Claude Simon et Yves Bonnefoy, là où gisent les discrets, les fidèles et les fervents.